Il y a
un an jour pour jour, mon Amie s’en est allée dans la dignité, comme elle l’avait souhaité… Je
n’oublierai jamais ces moments intenses qui ont couronné plus de 50 ans
d’amitié. "Il y a des jours, des
mois, des années interminables où il ne se passe presque rien. Il y a des
minutes et des secondes qui contiennent tout un monde." Cette phrase
est de Jean d’Ormesson, un de ses auteurs fétiches qu’elle m’a fait connaître, résume
si bien nos tout derniers moments ensemble. Même si elle vit en moi comme mes
Grands Absents, je me sens triste et un peu seule aujourd’hui, ces sentiments
bizarres liés au manque. Et les grandes
questions sur la finitude, l’après dont nous avons tellement parlé, je n’en
parle plus aujourd’hui, c’est je crois ce qui provoque cette tristesse et cette
solitude, la richesse et la profondeur de nos échanges. Tout en savourant du
thé japonais, le seul qu’elle buvait, j’ai pensé à tout cela et à des souvenirs joyeux aussi et ce qui domine
maintenant c’est cette chance inouïe de l’avoir eue, je suis privilégiée… Merci ma chère Chantal, ma Soeur pour tout ce que tu as été et es toujours pour moi...
Passionnée par le thé,je souhaite partager cette passion: ce qu'est le thé pour moi, comment j'ai commencé, mes coups de coeur théophiliques, mes rencontres, mes lectures, bref mon quotidien avec le thé
mercredi 27 février 2013
lundi 25 février 2013
En attendant la "goutte d'eau"...
Ce
matin après avoir dormi comme un bébé (effet bénéfique des herbes fines
d’hier ?), j’aurais dû sortir.
Mais en voyant l’état de ce qui fut un chemin,
et
celui de ma voiture, j’ai renoncé.
Je me suis occupée de cette superbe
azalée qui fleurit très bien mais perd beaucoup de feuilles. Je n’ai pas la
pratique de ces plantes, il faut que je sache si c’est normal. Après cela, j’ai infusé un Long Men Xiang de Thés de Chine et j’ai
essayé de me replonger dans le roman de Yasushi Inoué mais peine perdue, je n’accroche
vraiment pas. Je suis un peu excitée et je sais pourquoi… Je dois me calmer et
pour cela une douce tisane : le Jardin
d’Alix griffé ThéÔdor.
Mon programme de cet après-midi.
Il y a un
certain temps que je n’ai plus goûté à cette brique de vieux Pu Er ramenée de Taipei.
Infusée dans Grande Anse dont j’ai parlé ici : http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2009/01/elle-sappelle-grande-anse-je-lai.html
.
Après 2 rinçages immédiats, je commence les passages successifs. Et je
me rappelle avec beaucoup d’émotion ce lieu magique d’où provient cette galette,
il porte un nom qui dit beaucoup : Au bonheur serein et paisible :
http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2008/09/une-rvision-trs-personnelle.html
La liqueur est brillante et très goûteuse, d’abord des saveurs prononcées
de sous-bois après la pluie.
Grande Anse a le don de magnifier ces
feuilles.
J’ai tout à coup envie de déblayer cette neige même si je ne
compte pas sortir, je me sens bouclée.
Je rentre me réchauffer en
continuant les infusions qui au fur et à mesure deviennent plus sucrées. Et mes
pensées s’envolent maintenant entre Bordeaux et le Passeur de théières et ici
depuis que David m’a informé qu’une "goutte d’eau se dirigerait vers la
Belgique"… Cette métaphore me fait rêver, il ne s’agit évidemment pas de
pluie !
Les belles sont loin d’avoir tout donné, je vais continuer en
relisant un autre roman historique de Bernard Tirtiaux que j’ai aimé autant que
Le Passeur de Lumière.
Les sept couleurs du vent raconte le
périple du jeune charpentier Sylvain Chantournelle pour parfaire son art. On
emboîte les pas de ce compagnon pendant une trentaine d’années faites de joies,
de malheurs, de belles rencontres aussi ; c’est son indéfectible rêve qui
le fait se mesurer à l’impossible et le dépasser.
Elles ne sont plus très
jeunes mais elles ont encore de la ressource et des choses
à dire, je les remets dans la théière, j’y reviendrai demain. Je continue cette
passionnante relecture. C’est très rare que quand j’ai été emballée par un
premier roman, je le sois également par les suivants. J’ai en tête 2 romans qui
m’ont emballée : Le Parfum et Les Piliers de la Terre. Après les
avoir relus, j’ai acheté Le pigeon,
je ne l’ai pas achevé, quant au roman de Ken Follet, je ne me souviens même
plus du titre ! Encore une très belle journée, avoir des passions embellit
le quotidien parfois morose.
Je reçois à l'instant un courriel de Lydia Gautier que je me fais un plaisir de relayer ici avec toutes mes félicitations à cette véritable professionnelle, à la fois rigoureuse et créative:J'ai le plaisir de vous annoncer que 1001 Secrets sur le Thé a remporté samedi soir au Cookbook Fair au Carrousel du Louvre le "Best in the world" Gourmand Awards 2012. C'est un prix pour lequel "Thés et Mets : Subtiles Alliances" avait été finaliste France en 2009...
Je reçois à l'instant un courriel de Lydia Gautier que je me fais un plaisir de relayer ici avec toutes mes félicitations à cette véritable professionnelle, à la fois rigoureuse et créative:J'ai le plaisir de vous annoncer que 1001 Secrets sur le Thé a remporté samedi soir au Cookbook Fair au Carrousel du Louvre le "Best in the world" Gourmand Awards 2012. C'est un prix pour lequel "Thés et Mets : Subtiles Alliances" avait été finaliste France en 2009...
dimanche 24 février 2013
Un week-end surréaliste, tout en contraste
Hier, j’avais décidé qu’après la corvée courses, je passerais le
week-end dans mon salon bleu-thé, loin du monde : samedi musique, lecture,
méditation, thé et dimanche, un billet sur les tisanes et préparation de
l’atelier-dégustation thé à Andenne. Il n’en fut rien, une hallucinante
proposition de mon mari en a décidé autrement… Je dois remplacer la hotte qui
fait un bruit d’avion au décollage mais je dois aussi me résoudre à remplacer
ma cuisinière, alors que les taques sont encore parfaites, le four de cette
vieille compagne de plus de 20 ans fonctionne encore mais montre des signes de
fatigue et d’usure, il n’est malheureusement plus vraiment fiable. Cela ne
pressait évidemment pas, Xavier en a décidé autrement. Non seulement, il
voulait que cela se fasse ce samedi mais de plus, il voulait m’accompagner
« parce que je te l’offre et que j’ai une petite idée.» Ma stupeur passée,
j’ai accepté. Bien mal m’en a pris… Si j’étais allée seule, c’était l’affaire
d’un quart d’heure grand max, je voulais exactement la même. Nous voilà donc
dans un premier magasin, et là j’entends mon mari demander au vendeur de lui
montrer les plaques à induction et les fours encastrables, je ne veux ni l’un
ni l’autre, et jusqu’à plus ample informé, c’est moi qui cuisine! C’était donc
cela son idée… Pauvre Doudou, il n’a pas de chance, déjà j’ai du mal à accepter
les cadeaux, surtout de ce type-là mais en plus sa réflexion m’a achevée, "je veux que tu aies le nec quand je serai mort." Là, je ne rigolais
plus du tout, je commençais à être en manque… de plus, le vendeur ne me
plaisait pas, nous sommes donc sortis pour nous rendre dans mon magasin
habituel où j’avise un vendeur, je lui demande s’il a des cuisinières Bosch
avec four à chariot (je n’en veux pas d’autre). Il m’annonce que dans cette
marque, cela ne se fait plus mais il y a l’équivalent en Siemens. Je vais voir,
elle me convient, OK, c’est vendu. Là, intervient mon mari en me disant que je
ferai ce que je veux mais … il voudrait quand même avoir des renseignements sur
les engins précités, et c’est reparti pour un tour ! Pendant ce temps, je
vais jeter un œil sur les hottes pour constater que la mienne est vraiment une
antiquité, j’en choisis une au hasard quand mon mari m’appelle car après avoir
discuté avec ce vendeur à la patience archangélique, me propose un modèle bien
plus puissant, bien plus ceci, bien plus cela, je ne discute pas, on prend, je
n’avais jamais passé autant de temps dans ce genre d’endroit, j’avais hâte de
quitter les lieux… sauf que. Nous allons nous asseoir pour finaliser l’achat
quand mon mari constate qu’il est tout près des frigos américains.
Nous
en avons un depuis une quinzaine d’années, je ne comprenais donc pas son
intérêt soudain pour la chose, cela commençait à drôlement m’énerver. Je serais
partie si nous n’avions pas eu la mauvaise idée d’aller en une seule voiture
pour une fois ! Moralité, j’étais coincée mais j’étais à mille lieues
d’imaginer la suite… Il en a aussi acheté un neuf pour les mêmes raisons ! J’aurais
voulu me fâcher mais il avait l’air si heureux que je n’ai rien dit pour ne pas gâcher sa joie.
Après avoir préparé le dîner-souper, j’ai passé la soirée dans mon cocon en
partageant symboliquement cette Tisane de l’Abbaye avec deux êtres qui me sont très chers.
Le breuvage très doux et la musique de Bruch m’ont vraiment bien détendue.
Ce matin, elle était là
comme un linceul, mais cette fois, cela m’est
égal, je passe la journée dans mon cocon !
Mais avant cela, le
petit déjeuner avec mon mari et un drôle d’oiseau.
Première partie du
programme : thé et musique : le thé, un Tumsong issu du Jardin des cœurs heureux griffé ThéOdor.
La musique, le Grand Jacques. Pendant près de 3 heures, à l’écoute de ce poète
visité, écorché vif mais si touchant, me reviennent de merveilleux souvenirs
d’adolescence, avec mon amie Chantal principalement, cette époque où nous
refaisions le monde ; nous connaissions par cœur ses chansons, que nous
jouions à la guitare. Emotions intenses, pendant ses derniers jours l’année
dernière, elle a souhaité que nous revisitions cette période folle, pas facile
mais tellement excitante… Trois théières plus tard, le cœur heureux, je passe à
la deuxième phase : thé et lecture.
Changement de décor, un Houjicha griffé Tamayua infusé dans cette
jolie théière japonaise. C'est un très bon thé de lecture.
Pour accompagner la lecture de La
tuile de Tenpyô de Yasushi Inoué.
C’est la 4e de
couverture qui m’a décidée, j’aimais aussi les branches de cet érable japonais…
J’aimais l’idée de cette quête évoquée brièvement d’autant que la 3e
phase de mon plan est la méditation. Je dois avoir un vrai problème avec la
littérature japonaise, je ne suis pas du tout rentrée dedans… Je le reprendrai
plus tard, j’espère que j’accrocherai alors, ce ne serait pas la première fois,
déjà avec Le Maître de Thé du même
auteur, j’ai dû m’y reprendre à 2 fois : http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2011/07/il-y-un-temps-pour-tout-et-je-netais.html
. Je m’apprêtais à entreprendre la 3e partie du programme, la
méditation, quand mon mari est arrivé en me disant qu’on me demandait au
téléphone et que je ne serais pas déçue. Dois-je préciser que cet engin n’a pas
droit de cité dans ce lieu hors du temps ? Je descends donc au galop me
demandant qui je trouverais à l’autre bout du fil, j’ai tout imaginé sauf
cela : c’est Gabrielle que j’ai encore de temps en temps au téléphone, qui
m’annonce que 2 anciennes collègues voulaient me parler… je ne les avais plus
ni entendues ni vues depuis 30 ans. D’autres intenses émotions ont nourri ma
méditation…, on a décidé de se revoir dès qu’il ferait meilleur. Décidément,
c’est la journée des beaux souvenirs.
Après ce moment de nostalgie,
préparation du billet sur les tisanes, appelées Herbes fines par ThéÔdor
dont les écrins sont des boîtes bleues, de quoi me faire craquer. Je ne parlerai plus de la Tisane de l’Abbaye, voir ici : http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2012/12/premier-jour-de-lhiver-et-dune-nouvelle.html
mais de 2 autres, la camomille et la verveine. Le livre, je l’ai depuis le
siècle dernier mais si j’ai regardé toutes les superbes photos, je n’avais lu
que les quelques pages consacrées au thé. Pour chaque herbe, on pourra
découvrir 3 côtés : jardin, tisane, beauté, je ne m’attarderai qu’à ce qui
est dit de la tisane.
Je commence par la camomille dont j’ai déjà parlé
aussi (http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2013/01/a-chacun-son-metier.html
). Voici ce qu’en dit ThéÔdor : "Elle
a la couleur du soleil, de là d’où elle vient ! Cette tisane digestive,
souvent rangée dans « les boissons de grand-mère », est pourtant
aujourd’hui omniprésente dans nos produits du quotidien et prisée par de
nombreux amateurs de tous âge. La raison en est très simple : La
réputation de cette plante n’est plus à refaire, tant on lui prête des
principes énergisants, analgésiques, digestifs, anti-inflammatoires, pour ne
citer qu’eux …
Chez Theodor, nous l’aimons depuis
toujours, et nous vous proposons les plus jolis boutons de cette plante
radieuse.
Temps d’infusion conseillé : de 4 à
6 minutes avec une eau à 85°c."
Qu’en disent les
auteures du livre. "Prises en infusion, les fleurs de camomille sont connues depuis
toujours pour leurs vertus toniques et stomachiques. Elles apaisent les
digestions difficiles, calment une migraine naissante et diminuent les petites
fièvres." Plus loin il est
dit que "pour adoucir son incontestable amertume, il ne faut pas hésiter
à édulcorer l’infusion avec du miel ou du sucre", je suis
étonnée, je n’ai pas du tout perçu cette amertume, question de dosage peut-être.
Une pause pour préparer le souper et le partager avec mon mari.
Je passe maintenant à la verveine. Pour
ThéÔdor :
Le saviez-vous ? On la surnomme aussi "L’herbe de
Vénus"Cultivée depuis l’Antiquité, on attribue
à la Verveine mille vertus : lutte contre les migraines, la nervosité,
tonique circulatoire, douleurs gastriques, rhumatismes … Mais elle est surtout
connue pour ses bienfaits apaisants, pour s’offrir un petit moment de pause
confortable. Cette plante se consomme tout le temps, et de toutes les
façons : peut-être une des herbes les plus aromatiques de toutes les
plantes, elle vous ravira aussi bien en infusion qu’en cuisine ou en feuilles
dans votre bain !
Temps d’infusion conseillé : de 4 à
6 minutes avec une eau à 85°c."
Et le livre, moins complet : "Elle
possède des vertus légèrement sédatives et apaise les maux dus à une mauvaise
digestion". On signale toutefois "qu’il ne faut pas en
abuser, car à haute dose et en cas de prise prolongée, la verveine peut provoquer
une irritation de l’estomac". Rien par contre sur sa saveur ni
sur le dosage. Je l’ai trouvée amère, je pense qu’il s’agit aussi d’une
question de dosage, je recommencerai. Pendant tout ce temps, j'ai eu une pensée émue pour ma filleule, clouée au lit par une grippe canon, courage ma Puce, pense à samedi prochain! Ici s’achève un week-end inattendu,
surprenant mais finalement plein d’émotions. Je ne parlerai pas ici de mes
aventures avec Pay Pal et un virement européen, c’est un message codé, tout est
rentré dans l’ordre maintenant, il me suffit d’attendre la suite…
mercredi 20 février 2013
Des travaux qui m'enchantent!
Ils
auraient dû se faire hier, mais la fée électricité s’est transformée en
sorcière maléfique pendant plus de 5 heures, résultat, plus de courant, plus de
thé donc et accessoirement, plus de chauffage ni de possibilité de cuisiner non
plus. Alors, ce matin, j’étais très impatiente de voir arriver Jean-Charles,
cet artisan aux doigts d’or !
Une belle lumière dans un ciel tout
bleu malgré le froid piquant.
Et un Yamato
Kabuse Sencha griffé ThéÔdor pour tromper l’attente.
Mon regard se porte sur ce mur, il va bientôt y avoir du changement.
Et
sa sœur jumelle aussi va changer d’affectation. Pour le moment le mur est vide,
pour Pâques il sera à nouveau occupé.
Quelques heures plus tard… les
Tea for One - je refuse de les appeler égoïstes - vont temporairement prendre
place ici.
Quant aux jumelles, elles sont maintenant vouées à la
musique…
Mais voici le plus
grand changement : une étagère consacrée uniquement à mes théières en terre. Je suis ravie du
résultat, merci cher Jean-Charles pour ce travail, j’ai toujours été fascinée
par ceux qui savent utiliser leurs mains associées à leur cœur : aimer son
travail, et leur tête pour traduire et adapter les élucubrations de la pauvre
intellectuelle que je suis ! Quelques heures plus tard, il ne me reste "plus" que le nettoyage.
En effet, faire des trous dégage
de la poussière, beaucoup de poussière !
Même si je déteste cela, dans mon salon bleu-thé, je retrouve mon
instinct de perfectionniste, après 3 heures tout ce qui devait l’être est
impeccable, je continuerai demain parce que je ne sens plus mon dos, mes
épaules, et même mes doigts ! Je reprendrai mes lectures aussi et la
préparation du prochain atelier thé, j’ai encore le temps, il a été reporté au
17 mars au lieu du 10 pour cause de carnaval à Andenne, mais j’ai des envies de
mer du Nord, de Londres ou de Paris… Je n’ai pas beaucoup bu de thé aujourd’hui,
je me rattraperai demain !
dimanche 17 février 2013
Un week-end improbable et exceptionnel
Il est
une heure… du matin ce samedi. Je reviens de la cathédrale de Chartres. Eh oui.
Je me sens en forme, je n’ai donc pas envie de me rendormir. Direction mon
salon bleu-thé encore plongé dans cette nuit noire, sans étoile ni météorite.
Les belles reposent dans leur écrin de terre, je vais les réveiller.
Elles ont retrouvé leur générosité et m’offrent cette liqueur de la couleur du
soleil, qui me ramène à ce voyage dans le temps, l’espace et de merveilleux
souvenirs de lumière et de vitraux. J’ai toujours été fascinée par les vitraux.
Depuis mon enfance. Née dans une famille catholique pratiquante, je m’ennuyais
un peu à l’église le dimanche. Le latin, un prêtre qui, même magnifiquement
paré, ne montrait que ses talons et sa tonsure qui m'intriguait, des enfants de chœur, uniquement des garçons,
- les filles n’y avaient pas droit – alors que j’aurais aimé en être, tout cela
m’ennuyait mais une chose me passionnait : les vitraux et leurs jeux de lumière.
C’est à
tout cela que je pensais tandis que les infusions se succèdent.
Tout comme
tout ici ce liquide brillant et lumineux, j’avais l’impression que ces vitraux
vivaient grâce précisément à leurs jeux de lumière. Et je me plonge maintenant dans mon
adolescence et ce coup de foudre que j’ai eu pour les vitraux de la cathédrale
de Chartres, leurs bleus éclatants qui les transfiguraient. Dans les années 60,
je suis allée deux fois en pèlerinage à Chartres avec mon amie Chantal. Nous
étions toutes les deux éclaireuses et nous aimions cette idée de marcher en
priant et en chantant. Je suis particulièrement émue en évoquant ces souvenirs
très lointains, il y a un an, cette amie de plus de 50 ans vivait ses derniers jours
avant d’aller, en pleine conscience et sérénité, dans cet ailleurs dont on ne
revient pas: http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2012/02/adieu-mon-amie-ma-soeur.html )
La liqueur a pâli mais pas ces souvenirs extraordinaires.
J’infuse une dernière fois cet Oolong des Concubines. Il est devenu plus boisé.
Il n’y a pas que la lumière des vitraux qui transforment les choses.
La lumière du flash aussi.
Comme un jeu d’ombre
et de lumière,
même artificielle. Après un petit-déjeuner partagé avec mon mari, je file à la
librairie.
J’en reviens très excitée avec LE livre qui occupe mon
esprit depuis un vendredi printanier. Il y sera encore question de voyage au
Moyen Age et de lumière à une époque où les vitraux étaient, avec les
chandelles, les seules sources de lumière dans les chapelles, les églises et
les cathédrales.
J’aurai besoin d’un thé de lecture qui me tiendra
éveillée sans m’énerver, je suis réveillée depuis plus de treize heures. Cet
Oolong au ginseng, le Thé des Princes
griffé ThéÔdor fera l’affaire. Je me plonge alors dans ce livre qui,
en fin du siècle passé, m’avait fascinée, j’aime l’histoire passionnément et
donc les romans qui y font référence. Je retrouve avec émotion certains passages qui
m’avaient déjà frappée à l’époque, comme cette citation que j’avais
complètement oubliée : " Nous sommes des nains montés sur des épaules
de géants" signé Bernard, maître (verrier) à l’école de Chartres
– XXIe siècle, tiens, tiens. Et un sourire dès la première phrase du prologue qui met tout de
suite dans l’ambiance de l’époque : "Vieille mémoire me revient des pays
infidèles." Et un petit plongeon dans cette enfance où on nous faisait
à prier pour les "païens" (qui n’avaient rien demandé) et dans le
cours d’histoire, on y apprenait que Godefroy de Bouillon a mené la première
croisade pour délivrer Jérusalem des "infidèles". A l’époque, tout
cela ne me choquait pas, une dichotomie évidente : les bons et les
méchants, le paradis et l’enfer, un monde coupé en deux, heureusement nous
étions du bon côté. Et je pense à l’instant à cette parole d’Albert
Jacquard : " Classer pour ne pas penser." Je ne savais pas alors que
ces croisés n’étaient pas loin s’en faut de preux chevaliers… Des preux
chevaliers, il y en eut mais, comme le dit l’auteur de cette épopée : "(…)
ils ont souffert de la barbarie de la croisade, du fanatisme de la chrétienté
qui cautionna les plus infâmes exactions. Ils ne parleront jamais de la prise
de Jérusalem, qui fut un monstrueux et incontrôlable massacre, face auquel les
preux atterrés se trouvèrent impuissants. Ils tairont cette "guerre sainte" qui s’est avilie dans l’horreur et la répression, aussi gratuite qu’ignoble (…)" (pp. 104-105). Les heures passent, les pages
se tournent, ma 2e théière est vide.
Mais petit à petit, malgré mon envie d’aller
plus loin, je n’arrive plus à vraiment me concentrer, mes paupières se font de
plus en plus lourdes. Alors, après avoir relu la 4e de couverture,
je referme ce livre en pensant à demain j’aurai tout le temps de ne faire que
ce que j’ai envie, mon mari passe la journée avec sa meilleure amie avant son
départ pour l’autre bout du monde.
C’est pleine d’allégresse que je me
suis réveillée après une longue nuit réparatrice. J’aime ce paysage brumeux des
petits matins. Et tout est redevenu vert, un signe.
Après un petit-déjeuner vite expédié, tout est prêt,
c’est avec un Pu Er de La
Maison de la Chine que je reprends ma lecture.
A la fin de la
matinée, après avoir vidé 2 théières de ce Pu
Er très en phase avec les routes boueuses empruntées par les pèlerins, je
vais m’aérer un peu au jardin où, abrités sous les rhododendrons, je découvre les
premiers crocus alors que je n’ai trouvé aucune trace des perce-neige, les
premières sorties d’habitude, bizarre. Le dîner est vite expédié, j’ai mieux à faire.
Un Long Men Xiang de Thés
de Chine accompagnera cette fois ma lecture. La théière où dominent les
ors et les bleus me fait penser aux vitraux de Chartres où j’étais la nuit
dernière…
Il est passé seize heures sans que je m’en rende compte.
Le temps pour moi d’une pause méditative après avoir admiré ce beau ciel bleu à
l’image de cette journée exceptionnelle, cela sent le printemps.
Je
m’empare de cette boîte qui contient un trésor, le Sichuan Hong Mao Feng de chez Cha Yuan que m’a offert ma jeune sœur sur les conseils
de Sanmao. C’est d’ailleurs chez elle que je l’ai découvert il y a un certain
temps déjà.
Le parfum assez
capiteux qui se dégage de ces superbes feuilles sent la rose et les agrumes, et
je ne sais pourquoi, il me fait penser à des notes d’encens.
Je choisis
le verre pour les infuser, ce matériau à la base des vitraux. Et pour
accompagner ma méditation, des chants grégoriens.
Après 2 infusions,
La liqueur ambrée est toujours aussi douce mais ce sont maintenant des
notes de chocolat qui se dégagent de cette belle infusion.
J’en suis au 4e passage, les
feuilles sont maintenant tout à fait épanouies.
Les chants mélodieux se
sont tus, ce sera la dernière infusion dans l’ombre
comme dans la
lumière.
Un dernier regard aux belles qui ont tout donné, une pensée
reconnaissante aux cueilleuses et je retourne à ma lecture. Le soir est tombé
maintenant, mon mari est rentré, je continuerai la relecture du Passeur
de lumière demain. Encore un merveilleux et improbable week-end
s’achève comme un beau prélude au printemps tout proche maintenant.