mardi 6 mai 2008

LA révélation au retour de Giverny

- 25 avril -
Cette fois-ci, j’accompagne mon mari à Paris ! Nous avons en effet décidé d’aller re-re-revoir la maison de Monet et ce jardin qui célèbre avec tant de splendeur les différentes saisons. Le premier jour est donc consacré à la visite de ce lieu magique et surtout ce jardin qui ne pouvait qu’inspirer le grand homme. Je ne m’étendrai pas plus, ce n’est pas l’objet de cette histoire….
Le lendemain, je n’y coupe pas, mon mari m’invite là où on trouve des boites cannettes. "Tu pourras choisir d’autres thés et nous pouvons même y manger si tu le souhaites". Il savait ce qu’il faisait le bougre ! Gourmande mais aussi curieuse comme je suis, et bien décidée à ne m’intéresser qu’à la partie restauration, je m’empresse d’accepter en me demandant à quoi cet endroit pouvait bien ressembler. J’étais loin de me douter de la suite. Mon mari, qui connaît très bien Paris pour y avoir vécu près de 10 ans, gare facilement sa voiture (à l’époque c’était encore plus ou moins faisable) et nous voilà dans cette petite rue du Bourg-Tibourg que je découvre pour la 1e fois. Découvrir est un bien grand mot, le trottoir est très étroit, je le précède donc et… dépasse LA maison, perdue dans mes pensées c’est-à-dire en train de rêver sur le petit pont de du jardin de Giverny. Mon mari me rappelle alors à la réalité, je me retourne et vois cette double vitrine séparée par une porte étroite. Je franchis le seuil et là, complètement pétrifiée par ce que je découvre, je sens frémir mes narines, mon regard s’affole, je ne parviens pas à l’immobiliser, mes jambes se mettent à trembler, un vertige me prend tellement tout me semble hors du temps. Je sus à ce moment que le monde qui s’ouvrait à moi serait le mien pour toujours. Encore aujourd’hui je ne peux l’expliquer; ce que je sais, c’est que je me suis laissé imprégner par toutes ces sensations, un peu oppressée d’abord et puis petit à petit prenant possession de cet univers, mon univers à jamais. Mon mari veut m’entrainer vers le restaurant mais je reste immobile, comme tétanisée par ce lieu que je souhaite déjà ne plus quitter alors que je n’avais encore pratiquement rien vu. Finalement, comme je bloquais le passage, j’avance, soutenue par mon galant mari, un peu étonné par ma réaction après des années de résistance. Nous nous installons à notre table face au "bar", à côté d’une longue table couverte de gâteaux tous plus tentants les uns que les autres, de quoi faire un excellent goûter... sauf qu’il était midi. Nous étions les premiers clients alors que la boutique ne désemplissait pas. Un jeune homme en tenue de lin impeccable nous apporte alors le menu (on peut aussi manger salé) et un petit livre qui attire immédiatement mon attention : "L’art français du thé", je l’ouvre avec frénésie, délaissant le menu, le garçon me dit que ce livre pourra nous aider à choisir nos thés. Mon mari lui se saisit du menu et lui demande de nous conseiller. Celui-ci nous propose un apéritif au thé, j’accepte avec empressement, moi qui ne bois jamais d’apéritifs, je n’aime pas l’alcool dont ils sont immanquablement constitués, mais ô surprise, il s’agit de jus d’orange ou de pamplemousse et de … Marco-Polo, celui-là même qui sommeille dans une des 5 "cannettes" (ah, si je savais comment vous renvoyer à l’endroit où j’en ai parlé, mais cela viendra un jour, je l’espère du moins). Je ne me souviens plus exactement de ce que nous avons mangé, je me rappelle seulement du thé conseillé, un "Roi du Yunnan" pour moi, un "Lapsang Souchong" pour Xavier qui me demande de l’excuser un instant. J’accepte évidemment en espérant que "l’instant" dure longtemps, j’ai un livre à découvrir. J’ai d’abord caressé cette couverture fleurie rouge et noir, elle était douce et contrastait avec les pages intérieures plus rêches. J’ai aimé la couleur des caractères qui me rappelait la sépia de la collection de timbres paternelle, j’ai aimé les illustrations qui me rappelaient celles de certains de mes livres d’enfant dont ceux de la Comtesse de Ségur. Je me souviens d’un chapitre intitulé Thé et Gastronomie, que j’ai littéralement dévoré, je venais de découvrir qu’il existait des thés pour chaque repas. J’ai aussi découvert les règles d’infusion des différents thés, la température de l’eau et les quantités exactes de thé. J’étais fascinée par cet art que je ne maitrisais pas du tout, mais c’est certain, cela allait changer ! Je dus arrêter là mes réflexions et ma lecture initiatique, mon mari et notre apéritif venaient d’arriver. Je garde encore très présente en bouche, plus de 10 ans plus tard, la saveur de ce breuvage, que j’ai reproduit depuis avec bonheur et pour le plus grand plaisir de mes convives (j'ai reçu la recette ici). Nous passâmes de longues heures à table, les mets étaient délicieux et mon Yunnan m’a vraiment initiée au goût du vrai thé, bien infusé, à des lieues de ce que je faisais chez moi, dois-je le préciser…Comme je l’ai expliqué, mon histoire avec le thé a plutôt mal commencé, c’est par obligation que je m’y suis mise et je dois à la vérité de dire qu’à cette époque, je trouvais les petits sachets bien plus pratiques que le thé en vrac. J’avais pourtant tout ce qu’il fallait pour en faire un breuvage digne de ce nom, mais quand j’ai vu la couleur que prenaient les fameuses chaussettes, je les ai jetées, assez dégoûtée, non pas pour revenir aux petits sachets jaunes que définitivement, je trouvais insipides, non, je continuais à me servir des thés en vrac… que je mettais dans un filtre en papier et que je faisais "infuser" dans ... un percolateur flambant neuf… Eh oui, j’en étais là. L’aimable serveur répondait à toutes mes questions, j’observais aussi le "barman" qui manipulait avec tant de dextérité les "chaussettes" servant à l’infusion des thés. Les clients de l’après-midi commençaient à arriver et nous dûmes céder la place pour passer devant c’est-à-dire dans la boutique où je me suis empressée d’acheter le petit livre rouge. J’ai demandé à Xavier s’il était d’accord de revenir le lendemain parce que je voulais d’abord lire ce fameux livre avant de choisir "quelques" nouveaux thés et "peut-être" une théière. Il a tout de suite accepté, heureux de mon nouveau bonheur qu’il avait lui-même provoqué. Je ne lui serai jamais assez reconnaissante d’avoir persévéré dans son désir de me faire connaître cette "épicerie", moi qui le recevais si mal à l'époque. Aujourd’hui, je ne suis pas tout à fait certaine qu’il aurait insisté à ce point s’il avait su où cela me mènerait…. A suivre.

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