Le temps n’est plus vraiment estival mais pour le moment, je n’en
ai cure, j’ai d’autres préoccupations ou plus exactement des thés-occupations.
Parmi mes trésors, je vais enfin découvrir ce que contient cette belle
boîte.
Ce thé est d’autant plus précieux, outre qu’il est un des tout grands thés de Formose, qu’il me rappelle surtout une belle rencontre à Paris et pas
n’importe où ! http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2013/06/aujourdhui-premier-jour-de-lete-paris.html
.
Les feuilles roulées sont brillantes et d’un beau camaïeu de verts, ce qui
indique un degré faible de fermentation.
C’est un thé de haute altitude,
issu de la montagne de la poire (Li Shan), je l’ai découvert lors de mon séjour
à Taiwan.
J’avais alors été impressionnée par ses arômes frais et si
subtils.
C’est avec beaucoup d’émotions que je retrouve ces sensations dans
cette liqueur or pale.
J’en avais rapporté de ce voyage initiatique dans la Belle Île mais il y a bien longtemps que
je n’en avais plus et je n'en avais jamais retrouvé ici.
Grâce à Françoise, je peux enfin retrouver ce bonheur
gustatif. On m’avait alors expliqué que poussant à une altitude très élevée,
une des plus hautes de l’île si je me souviens bien, la croissance des théiers
était plus lente, ce qui donne aux feuilles ces arômes et ce parfum à la fois
si riches et si subtils.
Je savoure lentement chaque gorgée et des images
me viennent augmentant d’autant cette saveur qui reste constante de fraîcheur
et de force tout au long des multiples infusions.
Seule la couleur fonce
légèrement et le liquide devient plus aqueux.
Je contemple une dernière
fois ces feuilles qui bientôt feront partie d’un oreiller…
Après le
souper, j’ai eu envie de Pu Er, et
pas n’importe lequel.
Je ne vais plus le détailler ici, j’en parle ici : http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2012/05/beaux-souvenirs-nostalgie-et-esperance.html
C’est avec recueillement et dans une semi
pénombre que je m’apprête à infuser ces Feuilles dont je garde un souvenir magique.
J’ai encore un mémoire
le goût subtil de ce Pu Er 1980 que je ne
consomme qu’avec parcimonie, pas parce que je suis radine évidemment mais simplement parce
que je voudrais qu’il dure encore très longtemps, il n’a que 33 ans...
Dès
la première gorgée, je suis frappée par son extrême douceur et des notes
sucrées dont je n’avais pas vraiment gardé le souvenir.
Le parfum qui sort de la
théière est plus prononcé.
Ce qui me touche, c’est la beauté de la forme inhabituelle de 29
février,
l’aspect grainé de la terre,
l’harmonie de ses formes
particulières.
Les passages se suivent.
Les saveurs subtiles de la
liqueur montrent que cette brique vieillit bien.
Les feuilles se déploient
de plus en plus.
Chaque gorgée intensifie les sensations gustatives et les
émotions fortes liées à ces douces rétrolfactions.
Souvenirs forts de moments de
partage.
Un dernier regard sur ces nobles vieilles feuilles
avant un
bain qui durera toute la nuit sous l’œil de Lu Yu. Je suis comblée par cette
belle journée et ces fabuleux cadeaux. Merci chère Françoise et cher Guillaume, c’est à
vous que je la dois. Inutile de vous dire que j’ai bu à vous, à nos rencontres
passées, en espérant celles d’un futur proche…
Ce matin, mon premier
geste est d’aller voir ce que les belles me réservent.
La saveur douce et
sucrée a fait place maintenant à des notes plus boisées, de feuilles mortes
après la pluie mais aucune amertume cependant.
Elles ne mourront pas, elles
vont maintenant se préparer à entamer une nouvelles vie, bercer mes rêves. Je veux rester dans cet état de détente
absolue que seule cette boisson mythique me procure. Je reprends donc LE livre dont
j’ai déjà parlé brièvement ici : http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2013/09/une-journee-ordinaire-comme-je-les-aime.html
et en particulier le chapitre III Tao et Zen. Je l’ai déjà lu de nombreuses
fois, et pourtant, à chaque relecture je découvre encore des choses qui
m’avaient échappées ou qui ne me parlaient pas.
Mais avant cela, de quoi
garder mon esprit en éveil, ce Matcha
couleur de l’espérance, espérance d’une journée semblable à celles qui l’ont
précédées.
J’aime beaucoup l’estampe en regard du texte, elle s’intitule Vague féminine et représente assez bien
l’effet que me procure cette "eau chaude" imprégnée de l’essentiel, mon essentiel.
Je m’apprêtais à faire une lecture comparative de ce chapitre au demeurant
assez futile, j’y renonce après avoir lu ce qui suit (page 54) : "Toute
traduction est trahison et, comme un auteur Ming l’observe, elle ne peut au
mieux qu’être l’envers d’une broderie – tous les fils sont là, mais ni la
subtilité des couleurs ni celle du dessin." OKAKURA Kakuzô a
rédigé cette petite merveille en anglais alors que sa langue maternelle était
le japonais, n’y avait-il pas déjà là risque de "trahison", dans ce
sens où il explique des mots qui ne font pas partie de la culture dans laquelle
a il a écrit (du moins à l’époque) ? Beaucoup de sémantique dans ce
chapitre très philosophique, nécessaire pour préciser sa pensée et s’assurer
que chacun donne le même sens aux mots. Mais je reviens à Lao Tseu et sa
définition du Tao sur laquelle j’ai médité cet après-midi (page 55): "Il
y avait quelque chose de sans forme et de parfait avant que l’univers ne fût
né. Serein. Vide. Solitaire. Immuable. Infini. Éternellement présent. C’est la
mère de l’univers. A défaut d’un meilleur nom, je l’appelle le Tao." Okakura
analyse cette phrase et développe la pensée taoïste et fait la critique du
monde dans lequel il a vécu, il est mort il y a cent ans.
Et pages 62-63,
cette belle estampe intitulée Bateaux sur
une mer démontée (…) comme une allégorie de ce monde. Il y aurait beaucoup
de choses à dire sur ce chapitre très éclairant et enrichissant mais j’y
reviendrai. La réflexion que m’inspire cette lecture m’aide à progresser sur le
chemin de la voie du thé, un chemin que j’ai découvert il y a des années déjà
et sur lequel j’essaie de progresser avec passion et modestie. Thé
et Zen sont un. J’en suis encore loin mais je m’applique, j'arrive de plus en plus à vivre l'instant en faisant abstraction du reste. Autre chose,
jai oublié de donner les coordonnées exactes de ce petit livre : Okakura
Kakuzô : Le Livre du thé, Synchronique
éditions, Paris, 2013. (http://synchronique-editions.com/catalogue-ouvrage-ouvrage21.html)
3 commentaires:
Je reprends ma lecture de ton blog, et quel plaisir toujours renouvelé. Tes mots sur les dégustations, tes détails, ce bain de ta théière, cet oreiller si mystérieux et ce livre d'une maison d'édition que j'affectionne pour lire le Tao des parents, le Tao du couple et la voie du Tao...
Et dire que je n'ai toujours pas lu "Le livre du thé"
Merci Francine pour tes appréciations sur mon thé préféré que je ferai suivre à mon fournisseur taiwanais.
J'espère avoir l'occasion d'en déguster avec toi. La théière dans laquelle tu l'as infusé me semble bien jolie.
Bonne soirée.
Françoise
@ Vanessa: merci pour ton commentaire. Je ne connaissais pas cette maison d'édition mais elle m'a séduite et j'ai commandé 2 autres livres chez Filigranes cet après-midi. Il faut absolument que tu te procures Thé et Tao, tu vas aimer!
@ Françoise: encore MERCI pour ce thé +++. La théière est en effet très particulière, je l'ai achetée dans ce lieu magique: Source de Lumière.
Bonne fin de soirée à toutes les deux, bons thés
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