jeudi 31 juillet 2008

Le thé du Capitaine, tonnerre de brest!

Il était 20 heures quand j’ai sorti "Tonnerre de Brest" du frigo où il a infusé toute la nuit. Le mélange sec, composé de thé noir, d’algue, d’arôme naturel et d’écorces d’orange, sentait déjà très bon avec une prédominance d’écorces d’orange comme celles que l’on fait sécher sur les radiateurs en hiver.
Le parfum des feuilles infusées est moins prenant et une odeur de marée s'en dégage, les morceaux d'algues se présentent sous forme de brindilles et, chose curieuse, il y a des feuilles vertes qui n'ont aucune saveur, du moins pour mes papilles,est-ce du thé ou alors des algues? L’infusion même, d'un orangé prononcé, ne goûtait d’abord que l’orange; mais une fois cette saveur forte (comme le vocabulaire du célèbre Capitaine) un peu passée, une légère saveur de marée apparait. Rafraîchissante en cette fin de journée torride. Je ne pense cependant pas que LE capitaine aurait aimé ce breuvage, tonnerre de brest, ce n'est pas du whisky voyons.
Je ne l’ai pas transvasé dans un verre mais dans une 2e théière, une " Tea for one", appellation que je préfère nettement à "Egoïste", je ne sais d’où vient ce terme saugrenu. J’ai choisi cette théière parce que c’est aussi un cadeau de Guylaine, je m’en sers seulement en été pour boire des thés verts "ordinaires", le plus souvent sur la terrasse ou dans le jardin, c’est plus facile que le gaiwan qu’il faut remplir plusieurs fois.

mercredi 30 juillet 2008

C'était la première...

Je reviens enfin sur mon blog, délaissé depuis trop longtemps…. Non, je n’étais pas partie en vacances, mais malgré la foule de choses que j’avais envie de partager, je ne parvenais plus à écrire. Entre autres j’étais allée lundi à Lille avec Fanou et fais grâce à elle une rencontre très thé, j’en reparlerai. J’avais aussi, chaque jour, continué mes dégustations solitaires et émouvantes dans mon salon bleu-thé, je prenais des photos mais quand je voulais écrire, rien ne venait. En dehors de ces instants magiques, plus d’inspiration, plus d’envie même. La raison, la voilà, j’ai cassé une théière. Je me suis mise à frissonné, comme si un fluide glacial me parcourait alors qu’il faisait bien 25°. Je me suis alors sentie toute vide, très seule, sans exagérer, j’en étais même étonnée, du genre " un seul être vous manque et tout est dépeuplé". C’est en la rinçant que ce drame est arrivé. J’ai aperçu dans le jardin un oiseau (une de mes autres passions) que je ne reconnaissais pas et en m’approchant de la fenêtre, réflexe bizarre alors que je voyais déjà très bien ce petit volatile, j’ai heurté le bec contre la paroi de l’évier. C’était ma première théière en verre ; elle me servait à infuser de la citronnelle rapportée des Seychelles et qui, depuis des années, a prospéré dans la serre. De grande contenance, un litre quatre, j’y infusais également mes thés glacés quand j’avais des invités amateurs. A ce sentiment de vide et de solitude a succédé une grande tristesse et j’ai "vécu", ressenti très intensément en moi cette phrase superbe : "Objets inanimés, avez-vous donc une âme qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ?" J’ai essayé de me raisonner mais rien n’y a fait. J’ai vraiment pris conscience de ce lien qui m’attache à ces "objets", mais en sont-ils vraiment pour moi ? Me poser la question, c’est y répondre. Aujourd’hui, j’ai compris, j’ai tout simplement dû faire le deuil. Et c’est mon amie Guylaine qui, sans le savoir, m’en a sortie. Je ne m’en suis pas aperçue moi-même quand nous étions ensemble. Nous avions décidé d’aller manger chez Tea for Two pour passer un moment. Et comme chaque fois, ce fut magique : le bonheur de se retrouver (depuis que nous sommes en vacances perpétuelles, nous avons peu de temps…), des échanges riches et très vrais. Elle revenait d’un séjour en France et en passant non pas par la Lorraine mais par la Rochelle, elle a découvert une boutique qui vendait aussi du thé et elle m’en a rapporté, c’est "Tonnerre de Brest". Ah Guylaine et ses "petites" attentions, grand geste d’amitié, oui ! J’en ai déjà parlé et j’ai encore beaucoup à dire…
En rentrant, la première chose que j’ai vue, c’est la théière mutilée mais je n’ai plus ressenti ce pincement au cœur et mon cerveau s’est remis à fonctionner, j’ai voulu l’honorer une dernière fois. Je suis allée l’immortaliser dans la serre, au milieu de cette plante qu’elle a transformée pour nous en faire apprécier toute la saveur. Je ne sais pas si je parviendrai à la jeter et m’en servir comme vase est dangereux mais je la vois avec d’autres yeux non pas vides et tristes mais complices en me remémorant tous les bons moments avec elle. Quant à « Tonnerre de Brest », il infuse maintenant dans une autre théière en verre, je le boirai ce soir ou demain en pensant à ces moments trop courts mais imprimés en moi pour l’éternité. Et pour moi, c’est comme si l’ancienne lui transmettait le flambeau, chaque fois que je me servirai de cette petite " Tea for one ", je penserai à l’autre, la tristesse en moins, la reconnaissance en plus.

Merci Guylaine d'avoir provoqué cette résurrection...

lundi 21 juillet 2008

Une découverte: un Bi Lo Chun de ... Taiwan

Aujourd’hui vous allez faire la connaissance de mon amie Ling-Ling, grâce à qui j’ai réussi mon fabuleux voyage à Taiwan : elle m’a entre autres traduit toutes les adresses des lieux où je voulais me rendre, les lignes de métro et de bus pour y arriver, bref tout ce qui m’était utile, ici déjà, je n’ai aucun sens de l’orientation, alors quand tout est en mandarin…. Ling-Ling est professeur de français dans 2 universités de Taipei, c’est une spécialiste des 17e et 18e siècles. Chaque année, elle passe ses "vacances" à Bruxelles et à Paris, c’est-à-dire qu’elle peaufine ses connaissances, pourtant déjà très grandes, en passant ses journées dans les bibliothèques ! Mais, en insistant très fort, je parviens parfois à la détourner de son occupation préférée. Aujourd’hui, ce fut le cas, ce n’était pas très difficile, c’est la Fête nationale belge et tout est fermé. Cette fois-ci, elle m’a offert un Bi Lo Chun primé de Taiwan et nous l’avons "inauguré" cet après-midi. La première chose fut de lui faire traduire ce qui était noté sur cette belle boite vert tendre un peu violent comme la couleur des jeunes feuilles quand elles explosent après leur sommeil hivernal. J’ai pris soigneusement note de tout ce qu’il faut savoir pour honorer dignement cette "Spirale de jade du printemps", mais j’en parlerai plus tard quand je ferai une dégustation comparée entre celui-ci et celui de Chine continentale, les feuilles sont tellement différentes, je suis vraiment curieuse. Aujourd’hui, il s’agit d’une dégustation dans les règles de cet art subtil mais liée à un partage amical: le thé est au centre bien sûr mais nous allons pouvoir échanger nos impressions. Mon mari est de la partie, j’ai donc préparé 3 sets de dégustation. Rien qu’à leur air réjoui, je vois que le breuvage leur plait, ce qui n’est pas étonnant vu sa saveur ! Ling-Ling lui trouve une saveur très douce, légèrement sucrée et mon mari le trouve très ... vert. Je décide donc de ré-infuser les feuilles sous l’œil attentif de mes hôtes. Mais à la 4e infusion, j’appelle Lu Yu à la rescousse, ce thé a sur eux un effet légèrement hilarant. Vous avez du mal à le croire ? Regardez plutôt. Peut-être que ce jardin de thé se trouve entre des rangées de vigne... Quant à moi, c'est toujours un bonheur que de déguster ce breuvage et surtout de le faire partager. Deux infusions plus tard, nous terminons cet agréable moment, ce thé n’a pas encore donné tout ce qu’il a mais cette saveur particulière, celle de l’amitié, restera longtemps en bouche. Ling-Ling et moi avons passé le reste de l’après-midi plongées dans un superbe livre sur les Pu-Er ramené de Taipei et donc écrit uniquement en mandarin, elle traduisant et moi notant tout ce que j'apprends, pour pouvoir vous en parler bientôt.

dimanche 20 juillet 2008

Un "Te de cacao", un "chocolathé"?

Quand ma sœur m’a demandé de tester ce "Te de cacao" reçu d’une de ses amies, j’étais à la fois intriguée et sceptique. Intriguée parce que j’aime découvrir et le contenu de ce sachet ne pourrait que me surprendre ; sceptique aussi parce que du thé au Venezuela… Mais, curieuse comme je suis, j’ai testé !
La première bonne surprise, c’est que la cellophane, avant même d’être ouverte, embaumait littéralement le chocolat. Cela m’a immédiatement rappelé ma jeunesse et une visite faite à la firme Côte d’Or, LE chocolat belge (de l’époque, on l’a expatrié aujourd’hui). J’ai retrouvé exactement la même odeur envoûtante en même temps que légèrement écœurante. En effet, lors de cette visite, nous pouvions goûter à tout et tant que l'on voulait (et qu'on pouvait), ce dont on ne s’est pas privé, mais c’est devenu très vite impossible, nous étions comme imbibées par cette odeur prenante, rien que de respirer nous donnait l’impression de manger cette friandise tant aimée. J’ai découvert ce jour-là les délices de l’écœurement.
Le contenu était lui aussi surprenant ! En le voyant, j’ai eu l’impression que quelqu’un (peut-être même un animal, un singe par exemple) avait soigneusement récolté les enveloppes des "graines" de cacao ainsi que la pellicule de celles-ci pour en remplir le sachet. L’odeur, toujours aussi prenante, m’étonnait : comment pouvait-elle être aussi forte alors que je ne voyais que des "déchets" ?
De thé, par contre, aucune trace ! Forcément, j'ai le sachet à côté de moi et je viens de lire : "Ingredientes : cascara de Cacao tostada".
Je décide cependant de suivre les indications du sachet, du moins ce que j’en ai saisi, et de préparer ce breuvage. Version originale : "Coloque una cucharita de Te de Cacao porc ada taza de agua hirviendo, déjela en reposo, cuele y endulce a su gusto con azucar o miel". Ma traduction, sans doute très approximative : mettre une petite cuillère de Te de Cacao dans un tasse d’eau bouillante, infuser et laisser reposer, y ajouter sucre ou miel selon le goût.
J’observe ce breuvage bizarre, l’eau commence à se colorer en brun tirant sur le gris et une fine pellicule apparaît à la surface, ce n’est pas très appétissant mais l’odeur persiste mais, curieuse et gourmande comme je suis, je décide quand même d’y tremper mes lèvres, et mon audace a payé : la saveur est celle d’un cacao amer à la première gorgée mais celui-ci ne garde pas du tout l’amertume et c’est assez agréable à boire… et tient longtemps en bouche, à peu près une heure sépare la dernière gorgée du le moment où j’écris, et j’ai toujours cette saveur en bouche. De plus, chose très curieuse, j’avais faim au moment de préparer ce Te improbable, elle a totalement disparu !!!
Les "feuilles" par contre étaient devenues très foncées et l’odeur qui s’en dégageait était encore plus forte, j’en ai alors goûté une, c’était positivement immangeable, plus aucune saveur de chocolat mais bien de brûlé. Voilà tout ce que je peux dire de ce Te de Cacao.
Par contre Chocolathé existe, je l’ai rencontré mais cela fait partie de mes belles rencontres, ce sera pour plus tard...

mardi 15 juillet 2008

"Il suffit de passer le pont..."

Oui, "il suffit de passer le pont"... et l'aventure du thé continue. En effet, après avoir découvert les trésors de la boutique, on peut accéder par un petit pont de bois à la maison de thé, sobre et chaleureuse où nous sommes reçues par la complice de Jean-Benoît, Clémentine, toute jeune femme, à laquelle cette célèbre phrase convient si bien : "Aux âmes bien nées…", parce que la préparation du thé, elle connaît! C'est ici que vous pourrez savourer un (ou plusieurs) thé(s) dans 3 gammes de prix, de 4 à 6 €. Vous pouvez aussi essayer une dégustation comparée de 3 thés nature ou prendre le temps de déguster un très bon Oolong de manière traditionnelle en Gong Fu. Il est également possible de se restaurer : 3 menus vapeur sont proposés dont un végétarien. Mais aussi, sur réservation seulement, la découverte d’une des cérémonies chinoises de thé, le Gong Fu Cha. Pendant que nous dégustions un Genmaïcha pour ma soeur, un Temi pour moi, Jean-Benoît initiait un groupe de 4 personnes à cette cérémonie qui buvaient ses paroles avant de goûter à ce "parfum qui se boit". Leurs mines réjouies en disaient long sur ce qu'ils pensaient de leur première expérience. Il y a aussi possibilité de réserver une initiation au Chanoyu, la cérémonie japonaise du thé. Mais il n’y a pas que cela, il y a également une cave mystérieuse où il se passe des choses, et aussi un petit jardin zen, il faudra attendre ma prochaine visite pour en savoir plus... Cependant, si vous n’avez pas la patience d’attendre, Cha Yuan, ThéO se trouve 8, rue Saint-Jacques, c’est ouvert le lundi de 11h30 à 19h30, du mardi au samedi de 9h30 à 19h30 et le dimanche de 10 à 15h. Tél.: 33 (0) 3 28 52 43 70. Allez-y, vous ne serez pas déçu, la seule chose que vous risquez, c’est de devenir comme moi, accroc pour toujours. C’est tout le mal que je vous souhaite. Parce que plus qu'une boutique, plus qu'un salon de thé, c'est un esprit qu'on découvre ici. L'esprit du thé fait de curiosité, de soif d'apprendre mais aussi de modestie et de chaleur. Et encore, comme dit ma soeur, dans un autre registre: "Cha Yuan, c'est toujours du bonheur en entrant et des paquets en sortant"...

Un jardin de thé à Lille: Cha Yuan

Lille : son beffroi, son théâtre, ses superbes façades, son boulevard du peuple belge, ses boutiques nombreuses et variées, son Furet, la gentillesse des gens du Nord et beaucoup d’autres belles choses valent déjà le détour. Mais aujourd’hui ce n’est pas pour jouer les touristes que ma sœur et moi y sommes allées. Il y a un autre endroit qui à lui seul vaut le détour, c’est CHA YUAN, LA maison de thé de cette ville.
Après avoir anticipé le plaisir en regardant la vitrine, on pénètre dans cette ancienne maison superbement rénovée et nous quittons alors "le bruit du monde" pour entrer dans ce havre de paix chaleureux et accueillant, un lieu hors du temps. Une vraie caverne d’Ali Baba où l’on peut trouver de nombreux thés, plus de 300, des plus rares aux plus humbles, chinois, japonais, indiens, népalais mais aussi venu d'Amérique et d'Afrique du Sud, d'autres plantes comme le maté et le Rooibos. Sans oublier, comme le montre la photo suivante, tout ce dont on a besoin pour lui rendre hommage en l’infusant correctement. Une brochure décrivant chaque thé peut vous guider dans vos choix. Mais aussi une étagère "senteurs" remplie de petites boîtes pleines de thé vous permet de les humer avant de vous décider.

L’âme de ce lieu ? Jean-Benoît Bourrel, à l’image du lieu, si professionnel, passionné par son sujet dont il parle avec fougue et qu’il fait découvrir avec talent et modestie à tout qui s’y intéresse. Et cela, toujours avec un large sourire qui en dit long sur son état d’esprit. Ceci termine la première partie de mon récit, comme une mise en bouche, une envie d'aller plus loin. Suivez-moi, il suffit de passer le pont...

lundi 14 juillet 2008

La belle histoire d'une théière relookée, d'un thé de méditation et d'un grand geste d'amitié

Comme ma sœur me l’a rappelé hier, plusieurs fois déjà j’ai écrit dans ce blog que je raconterais l’histoire de ces "objets inanimés", je commence donc aujourd’hui par cette très belle et émouvante histoire. Elle fut blanche jusqu’à ce 21 avril 2002. Ce jour-là, j’avais invité Martine et Jacqueline à une afternoon tea à Groenendael. Jacqueline m’a alors offert une superbe tasse peinte par elle, et immédiatement je l’ai associée à cette théière (trop) blanche tout à coup que j’aimais beaucoup à cause de sa forme très ronde. Je lui ai demandé si elle était d’accord de la peindre aux couleurs de cette si jolie tasse et d’y noter une phrase de Lu Yu qui me touche beaucoup, que j'ai déjà citée le 7 mai (post mon ancien blog: 28 avril). Quelques jours plus tard, c’était chose faite. Je décide alors de l’inaugurer avec mon amie Guylaine, venue le lendemain, c’est elle qui boit dans la tasse assortie, moi je choisis une simple tasse blanche en lui expliquant l’histoire et de la théière et de la tasse. Elle ne dit pas grand-chose mais n’en pense pas moins, je le comprendrai quelques semaines plus tard. Début juin, je décide d'aller manger chez Table à thé à Liège, je reçois alors un joli paquet que je suis priée d’ouvrir. J’y découvre émue la sœur presque jumelle de la tasse reçue de Jacqueline, dans et autour de laquelle je lis: " Je suis le thé, je dilue le spleen et je parfume le bonheur". Mais ce n'est pas tout, un petit mot écrit sur un beau bristol accompagne ce fabuleux cadeau : "Francine, ce petit souvenir très symbolique à l’occasion de mon départ. Pour te rappeler tout ce que nous avons eu la chance de vivre ensemble dans le passé. Pour que tu ne m’oublies pas dans le futur (mais je n’ai pas d’appréhension à ce sujet). Pour t’accompagner dans les bons et les mauvais jours. Avec toute mon amitié, Guylaine". C’est tout elle ce beau geste. D’habitude, lorsqu’un(e) collègue part à la retraite, c’est il ou elle qui reçoit les cadeaux... J’emploie très souvent cette théière, principalement quand j’ai envie de lire ou d’écrire, ce qui était le cas aujourd’hui. J’y fais infuser du Yunnan aux pistils de lotus, acheté à la Tea House, dont je parlerai plus tard : "Thé noir, pauvre en théine. Le pistil vert de lotus est utilisé au Vietnam pour faciliter le sommeil". Il ne me fait pas cet effet mais par son action apaisante, il m’aide à méditer, à lire ou à écrire, en ne pensant qu’à l’instant présent. L'infusion , d'une couleur ambre, a un goût sucré, légèrement caramélisé et fruité, cela m'évoque le chasselat et la pêche de vigne. Mais il a surtout la saveur d'une belle amitié... Et à cet instant, j’ai choisi de re-re-relire le CHA JING ou Classique du Thé de Lu Yu, le premier livre jamais écrit sur le thé. Je voulais retrouver la phrase écrite sur la théière dont je viens de vous conter la belle histoire, mais elle n’y est pas. Ce dieu du thé en a écrit d’autres, j’aimerais les découvrir mais je ne les ai jamais trouvés. Concernant ce Cha Jing, Lu Yu nous dit tout ce qu’il faut savoir pour infuser un bon thé, de la cueillette à la dégustation sans oublier les ustensiles et l’eau. Et ce dans un style tout à fait particulier, presque poétique mais parfois énigmatique. Et malgré les commentaires donnés par la traductrice, certaines phrases le restent, comme pour faire planer un certain mystère. A la fin de l’ouvrage, se trouve la copie du manuscrit d’origine. J’ai bien aimé aussi la préface qui situe cet ouvrage dans son contexte historique. Je vous en donne les premières phrases : "En cette année 780, tandis que lu Yu, de la dynastie Tang, favori de l’empereur Taisung, né à Hou-pei - en Chine centrale -, abandonné enfant au bord d’une rivière et adopté par un moine du monastère du Nuage du Dragon, rédige ce Cha Jing, le tout premier livre jamais consacré au thé, Roland vient de se faire piéger à Roncevaux et Charlemagne guerroie en Westphalie avant de passer des vacances en Italie. Le bouddhisme arrivé d’Inde imprime la société chinoise ; l’imprimerie ouvre une ère florissante aux belles lettres ; le thé a, lui, déjà plus de 1500 ans d’histoire : Lu Yu est à l’exact mi-chemin entre sa découverte attribuée au divin empereur Cheng Nung (2737-2697 av. J.-C.), père de l’agriculture, et notre 21e siècle". A vous maintenant de découvrir la suite. L’édition que je possède a été publiée en 2004 chez J.-C. Gawsewitch. Bonne lecture.

vendredi 11 juillet 2008

Un thé vert ... bolivien!

Cette nuit n’a pas été de tout repos, je me suis couchée très troublée par ce reportage d'hier. Les visages, les yeux tristes surtout de ces cueilleuses exploitées, leurs corps décharnés usés par un labeur tellement dur alors que le fruit de leur travail épuisant nous procure des instants si doux, m’ont tenue éveillée longtemps. Ce matin, je n’ai pas éprouvé le même plaisir en ouvrant les vitrines où reposent mes boites. Je n’avais pas envie de n’importe quel thé, j’avais envie de déguster du thé "propre". Non que je sois naïve, je sais que le travail des cueilleuses est très mal rétribué et ce n’est pas en boycottant le thé qu’on fera progresser leur condition, mais simplement je me suis rendu compte que je ne connaissais pratiquement pas les conditions de cueillette de ce qui fait mon bonheur. Je me contentais seulement de penser avec respect et reconnaissance à ces petites mains habiles pendant que mon thé infusait (sans oublier ceux qui transforment ces feuilles bien sûr, je pense qu'une feuille de qualité moyenne peut devenir un très bon breuvage par le savoir-faire de ceux qui la travaillent mais je suis encore plus persuadée qu'une excellente feuille donnera une boisson médiocre si elle n'est pas bien traitée, voilà pourquoi j'ai tant d'admiration pour ces petites mains de fées). Ce matin, je voulais du thé juste, équitable, je voulais m’éloigner de cette Asie que j’aime pourtant passionnément et qui parfois malheureusement a gardé des attitudes colonialistes. Mais qu’avais-je d’autre ? Du thé des Açores, un vert et un rouge, qui ont le goût de l’amitié, celle qu’a eue pour moi Valeria qui me les a ramenés, mais qui n’ont que cela. Un jour je ferai une dégustation pour essayer de mettre des mots sur ce que je n’aime pas ou peu dans ces thés. Mon choix s’est alors porté sur un thé vert de … Bolivie, issu de l’agriculture biologique et du commerce équitable. Ce n’est pas le bio qui m’intéresse ici (le bio, je n’y crois que très, très, très peu), mais bien le commerce équitable. J’ai découvert ce thé inconnu à l’Heure bleue, j’ignorais que la Bolivie en produisait (jusqu'à ce jour, pour moi, Bolivie était = à coca et... quinoa!). J'ai eu envie de vous faire partager les sentiments qui me sont venus en le préparant. La colère et la frustration face à l’impuissance ressentie la veille ont disparu, il reste par contre l’envie de faire quelque chose. Et la seule action possible pour l'instant est d’être attentive à la provenance des thés, essayer de ne consommer que ceux qui sont issus du commerce équitable. Y en a-t-il beaucoup ? Les informations sont-elles fiables ?
Mais le thé, même en ce moment de doute et de tristesse, a sur moi un effet salvateur : en dégustant ce breuvage, je me sens apaisée.
Je n’en ferai pas une analyse gustative classique ici, sachez seulement que j’ai suivi les indications du sachet : 75 – 80° pendant 3 minutes ; je l’ai fait infuser 2 fois ; la première à 70° la 2e à 80°. Plus de précisions, ce sera pour plus tard. Les photos vous donnent déjà des informations visuelles…

jeudi 10 juillet 2008

Thé vert, thé amer qu'ils ont dit. Moi je dis écoeurant...

Ce soir, le thé a un goût écoeurant. Heureuse et détendue après avoir terminé le billet du jour sur mon blog, j’ai encore feuilleté les livres consultés avant de les ranger dans la bibliothèque. J’aime le contact physique avec le papier, le glacé me chauffe le cœur, eh oui. Et même si je ne lis plus rien, je regarde à nouveau les superbes images. Puis j’allume la télé et je tombe sur Envoyé spécial et un reportage sur le thé vert. Je n’ai pas vu le début mais ce que je vois et surtout ce que j’entends me glace. Je savais que ces humbles cueilleuses travaillaient dur pour pas grand-chose mais à ce point, non vraiment. Je suis tétanisée, des sentiments violents et contrastés m’envahissent, à un vague sentiment de gêne, de culpabilité même, succède une violente envie de frapper. Frapper ce "garde chiourme" qui traite ces femmes comme un contremaitre du temps de l’esclavage, une trique à la main. Il aboie sur ces femmes qui travaillent si dur sous une chaleur humide étouffante (mais de cela on ne dit rien) et, méprisant, humilie une cueilleuse âgée. Cette femme qui nous dira qu'elle a 54 ans (je lui en aurais donné facilement 70), qu’elle ne voit plus bien, qu’elle est fatiguée, et cette lassitude est palpable… J’aurais dû prendre des notes mais je suis trop bouleversée par les grands yeux tristes de ces femmes usées, 1kg de thé leur rapporte 20 centimes d’Euro. Je l’ai la terrible réponse à ma question idiote : non, elles ne boiront jamais ce qu’elles cueillent. Je n’oublierai jamais le visage de la doyenne de ce village qui doit continuer à travailler à 68 ans si j’ai bien retenu, parce qu’elle a un rêve cette grand-mère si digne dans sa couronne de cheveux blancs : envoyer sa fille à l’école pour qu’elle ait une meilleure vie. Sans haine et sans colère (comment fait-elle ?) mais avec amertume elle nous dit que les blancs les ont trompés, on leur a promis une meilleure vie qu’en Inde, ils sont alors partis à Ceylan (c’est le cas de son père) mais les promesses étaient des leurres. Ils vivent toujours sans eau courante, sans électricité et l’eau du puits commun est polluée par les pesticides utilisés dans les plantations de thé. La fin du reportage est un peu plus optimiste, une plantation bio. Le terme équitable est prononcé : les cueilleuses sont respectées, appréciées et "bien payées" nous dit-on. On assiste enfin à la dégustation de ces "thés exceptionnels qui seront vendus en France 50 Euros les 100g", ( de 20 centimes à 50 Euros, c’est quoi encore le cynisme ?) Pour un thé infusé avec les larmes des cueilleuses au moment de toucher leur "salaire", que j'appelle moi une aumône infamante. Thé vert amer était le titre de ce reportage, qu’en pensez-vous ? Parfois quand je bois un thé que je trouve sublime, je pense aux cueilleuses et j’ai les larmes aux yeux d’émotion mais ce soir, c’est de la tristesse et une rage impuissante qui m’envahissent en pensant à ces visages burinés et aux grands yeux tellement las de ces mères courage...

Dégustation du Jun Shan Yin Zhen, un thé jaune plein de surprises

Même si par ce temps, tout juste bon pour les canards et les grenouilles, le Pu Er est tout à fait indiqué, j’ai recommencé mes dégustations de Yin Zhen du Hunan. Mais avant cela j’ai relu toute la doc que j’avais sur le sujet, particulièrement ce qui concerne les temps d’infusion qui varient vraiment beaucoup : de 3 à 20 minutes.
Si ces ouvrages traitent du même sujet, certains détails ou la manière de présenter les choses varie d’après les auteurs et je trouve intéressant de confronter les points de vue voire parfois de relever certaines divergences. Et comme la plupart de ces livres sont superbement illustrés, c’est toujours pour moi un grand plaisir de les relire.
1. BECAUD N., Le thé, la culture chinoise du thé, Lyon, Ed. S. Bachès, 2004.
2. CHEN W., Le thé, joyau de l’empire du milieu, Paris, Quimtao, 2000.
3. GAUTIER L., Le thé, arômes et saveurs du monde, Genève, Aubanel, 2005.
4. MONTSEREN J., Guide de l'amateur de thé, Paris, Solar, 1999.
5. SCALA O., Thés, cultures, senteurs, saveurs, Paris, Solar, 2005.



J’ai déjà donné quelques renseignements sur l’un des deux thés jaunes, le Meng Ding Huang le 16 mai dernier et suite, je complète donc ici à l’aide des livres cités plus haut. Concernant la description du Jun Shan Yin Zhen (Aiguilles d’Argent de la Montagne de L’Empereur) j’ai choisi de citer chaque auteur qui apporte une précision : "Il fait partie des 10 thés chinois les plus célèbres. Il est cultivé dans la province du Hunan sur l’ile Junshan dans le lac Dong Ting. Ce thé est entièrement composé de bourgeons de forme droite recouverts de duvet. L’empereur Qianlong appréciait tout particulièrement ce thé. Chaque année, il fallait lui en livrer 18 livres", N. Bécaud p. 28.
Jean Montseren nous parle de la montagne de L'empereur: "La légende raconte qu’il y a 4 mille ans les 2 veuves de l’empereur Shun, traversant le lac en barque pour ramener le corps de leur défunt époux, auraient été entraînées par une lame et seraient tombées à l’eau. Afin de les ramener à la surface et de les sauver de la noyade, des coquillages se seraient regroupés, formant une colline, le mont de l’empereur, haute de près de 80 mètres", p.181.
"Grand cru parmi les grands crus, ce Yi Zhen extraordinaire appelé aussi "Plume jaune", est cultivé sur 1km² de surface. Il faut cinquante mille bourgeons pour faire 1kg. Ce fut d’ailleurs tout le poids de la récolte de 1871, année de la visite de l’empereur. Celui-ci fut si séduit qu’il ordonna 9 kg par an de ces divines plumes au titre de son tribut. Aujourd’hui les théiers - des "Dabai" - produisent 300kg, extrêmement convoités dans le monde entier", O. Scala, p.120.
L’ingénieure agronome qu’est L. Gautier nous apprend que: "Sa transformation débute comme celle du thé vert chinois sauf que la fixation de la feuille à haute température humide se passe sous couvert de paille (15 minutes). Elle est suivie par un pseudo-repos prolongé toujours sous couvert pendant lequel une légère fermentation se produit (1 jour). Puis le thé est délicatement roulé en aiguilles (20 minutes) et séché (20 minutes)", p.97.
Passons maintenant à mes dégustations, de véritables expériences… j’ai en effet voulu tester les différents temps d’infusion proposés dans les livres consultés. J’ai d’abord commencé par suivre les indications notées sur le sachet de l’Heure bleue : "Eau à 70°, 3 à 5 minutes ou plus… Peut s’infuser 3 ou 4 fois", sitôt lu, sitôt exécuté, j’ai donc pris 2 gaiwans de 10cl, j’y ai mis 2.5g de Jun Shan Yin Zhen et l’ai fait infuser une 1e fois, l’un à 3’, l’autre à 5’. Les feuilles sèches sont vert très pâle argentées, certaines même dorées, toutes sont veloutées ; en les humant, j’ai eu l’impression de sentir le gazon coupé et séché. L’infusion à 3’ me fait penser à la guimauve de mon enfance, celle à 5’ m’a fait penser à la fleur du tilleul, je m’impressionne, d’habitude je ne suis pas aussi inspirée ni "productive". Les feuilles infusées sont assez semblables, elles ont viré au vert jade pâle. Je n’ai pas senti de différence de goût lors de la 2e infusion. Je n'ai pas observé non plus de changement dans la couleur de l'infusion. Ni d'ailleurs dans l'aspect des feuilles mais en dégustant ce breuvage avec délice et volupté, je pense au savoir-faire de ces cueilleuses si habiles, sans qui je ne goûterais pas à ce plaisir. Une question, une fois de plus: ont-elles la possibilité elles aussi de déguster un tel nectar? J'ai peur de la réponse... Mais que faire? Par contre lors de la 3e infusion, la couleur de celle-ci a foncé et, pour celle à 5’ elle a viré à l’orange clair ; quant au goût, j’ai trouvé la 1e plus sucrée et la celle à 5’ m’a fait penser à de l’abricot. J'ai été vraiment inspirée pour une fois, peut-être Lu Yu y est-il pour quelque chose, il est présent chaque fois que je me livre à une dégustation "dans les règles". Passons maintenant à la dernière expérience, la plus curieuse et la plus excitante : l’infusion de 5g dans un verre (20cl) pendant 20 minutes ! Je cite à ce propos d’abord O. Scala : "Ceux qui ont la chance d’avoir quelques grammes de ce thé peuvent contempler le ballet extraordinaire de ses feuilles ; posées au fond d’un verre haut et recouvertes d’eau chaude, elles montent et descendent 3 fois de suite. Leur mouvement spontané dure une vingtaine de minutes…précisément le temps d’infusion nécessaire pour ce breuvage, qui se savoure avec les yeux, le nez et la bouche", page 120. Ce n’était pas systématique pour tous les bourgeons, moins de la moitié de ceux-ci m’a offert ce spectacle curieux.
Wei Chen ne dit pas autre chose, à quelques détails près… : "Lorsqu’on verse de l’eau bouillante dans la tasse, le bout des bourgeons pointe hors de l’eau, quelques minutes après, ils se renversent horizontalement dans l’infusion et restent debout dans l’eau, un instant après ils montent et descendent pour remonter et redescendre trois fois de suite avant de tomber définitivement au fond de la tasse. On donne avec plaisir un surnom à ce thé : "Trois montées et trois descentes". De temps en temps quelques bulles d’air sortent des bourgeons et s’éclatent à la surface de l’infusion, dégageant un arome enivrant. Les bourgeons restent enfin debout au fond de la tasse, comme de multiples jeunes pousses de bambous ou arbres qui rivalisent d’ardeur pour monter vers le ciel. Tout en dégustant la saveur succulente, on regarde dans la tasse, un immense plaisir envahit l’esprit. Un grand bonheur" p.122. Comme vous le remarquez sur la photo, la plupart des bourgeons se dresse vers le haut, et c’était encore plus remarquable avant que je ne déplace le verre pour l’immortaliser. Je n'ai pas vu de bulles. Par contre, j’ai été surprise et un peu déçue par l’infusion, je n’ai retrouvé ni la subtilité ni la fraîcheur des infusions en zhong. J’ai alors décidé de la laisser refroidir complètement, le résultat était encore plus curieux, j’ai eu l’impression de boire un liquide "piquant" comme l’eau gazeuse, plus du tout une infusion duveteuse et veloutée mais par contre très rafraîchissante malgré la sensation de la râpe…
Avant de terminer ce long chapitre, je voudrais vous faire partager le plaisir que j’ai eu à lire ce qui suit, il s’agit du "moment". Et ici, O. Scala se fait poète : "Ce Yin Zhen est vraiment un thé pour le soir. Sa légèreté et sa fraîcheur le rendent encore plus appréciable l’été (je veux bien le croire…mais je n’ai pu le vivre, il fait à peine 15°). On le déguste à petites gorgées pour en extraire toute la subtilité, quand on veut célébrer le simple bonheur fugace d’un coucher de soleil ou un moment de pure tranquillité". J. Montseren, dont c’est la façon habituelle de décrire la manière de préparer les thés, nous donne son "conseil de pratique : 2.5g pour 10cl, de 5 à 15 mn (à la lumière d’une bougie rouge / au charme des fleurs ultimes) dans une eau attisée (70°C). Moment privilégié : quand on appelle les parfums"... p.182.
Quant à moi, je vous appelle à me faire part de vos impressions, constatations si vous décidez d'expérimenter ce thé vraiment pas ordinaire. Bonne dégustation.

mardi 8 juillet 2008

Une semaine déjà...

Voici ce qui se cache derrière ce titre énigmatique : il y a une semaine exactement, Stéphane, mon adorable neveu (que l'on aperçoit de dos à côté du landau bleu), a organisé une fête pour dire adieu à ses copains avant de partir pendant +/- un an là "Où le vent me portera" (titre de son blog), aidé quand même par sa "Béhème" à 2 roues. Cette fête a eu lieu ici et ce 1er juillet restera gravé dans beaucoup de mémoires (nous étions 76…), d’abord parce qu’il faisait merveilleux du début (18h30: 28°) à la fin (2h30: 20°) de cette mémorable fête que nous avons passée dehors jusqu’au bout. Mais aussi parce qu’une superbe ambiance y était, et contenter autant de monde n’est pas toujours aisé.
Et le rapport avec le thé, vous demandez-vous sans doute? La photo suivante vous répond. Pour me remercier d'avoir pu organiser cette fête ici, il m’a offert cette superbe théière, très anglaise, même si je lis sur le fond : "Reg. N° 15541 AUSTRALIA". C’est une ancienne Royal Winton Queen Anne, je l’adore ! Il fallait trouver un thé à la hauteur de ce superbe cadeau. Cela ne s’est pas imposé immédiatement à moi, j’avais d’abord imaginé un Margareth’s Hope ou un Puttabong, mais même ces grands Darjeeling me semblaient trop "communs". Je l’ai alors installée dans mon salon bleu-thé en attendant l’inspiration et cet après-midi, au moment où j’ai pénétré dans ce lieu magique, j’ai trouvé : ce sera un Yin Zhen du Hunan, je l’ai découvert lors de la dégustation du 1er juin à l’Heure bleue (vous connaissez maintenant) et j’ai été immédiatement séduite par sa finesse, j’avais l’impression de tapisser mon palais de velours. Depuis, j'en bois régulièrement soit dans un gaiwan soit dans un verre. C’est en tremblant un peu que j’ai préparé l’infusion, allais-je retrouver les mêmes sensations en théière de 80 cl ? Eh bien non MAIS c’était tout aussi troublant, j’ai eu l’impression de découvrir un thé inconnu, à la fois subtil et très prenant, plus que probablement lié à la rétro-olfaction… des émotions, celles éprouvées lorsque j’ai reçu ce cadeau ! Je continuerai donc à infuser ce magnifique Yin Zhen dans cette théière mais je n’en parlerai pas ici, j’ai fait plusieurs expériences avec ce thé fabuleux, je conterai mes surprenantes aventures très prochainement. Je me contente maintenant de déguster ce breuvage en pensant à Stéphane avec reconnaissance. Je déteste l'engin sur lequel il est parti, j'en ai peur, pas de lui qui est prudent mais des autres... Et pourtant, s'il avait eu un side-car, je l'aurais bien accompagné,allez comprendre!
Par contre, en sirotant LE breuvage, j'imaginais celles que le contenu de cette merveille a comblées.... Dans mon rêve éveillé, Victoria était Reine et quelques nobles dames d'âge mûr, installées confortablement malgré leurs encombrantes robes longues à frou-frou succombaient avec délice et oserais-je le dire, volupté, au rituel du Five o Clock avant de reprendre qui sa tapisserie, qui sa broderie ou sa dentelle, tout en devisant de choses et d'autres. Ah, si je savais broder, je reproduirais ces motifs un peu surranés mais tellement touchants sur un napperon pour y déposer "Queen Anne" ou pour lui offrir un cache-coeur (ces très british tea cosy).

dimanche 6 juillet 2008

Un dimanche pas comme les autres à l'Heure bleue

Comme vous avez pu le lire à la fin du précédent message, il s’en passe des choses à l’Heure bleue chaque premier dimanche du mois. Aujourd’hui, 6 juillet c’est le premier dimanche du mois alors suivez-moi, je vous y emmène. Et cette fois, je n’y vais pas seule, mon amie Anne-Marie Nihoul m’accompagne. Elle aussi c’est une passionnée, de chocolat, artisanal évidemment. Elle crée (entre autres) des pralines fabuleuses dont certaines au thé. Mais je n’en dis pas plus, ce sera l’objet d’un autre article, il y a tant à dire et sur le personnage et sur ses créations. Nous étions donc 4 hédonistes passionnés à nous retrouver dans cet endroit très thé. Ce dimanche-ci est consacré à la dégustation de 3 thés verts japonais (j’entends d’ici les puristes me dire que c’est un pléonasme… mais que nenni, ce n’est plus tout à fait vrai, même si j’ai des doutes sur leur thé "noir", les chiens ne faisant pas des chats je ne suis pas très pressée d’y goûter). Cela tombe bien, ces thés sont très rafraîchissants et nous sommes en été, même si certains jours on peut en douter.

Monsieur thé nous propose d’abord un Kukicha, les brindilles jaunâtres sont très belles et contrastent avec les feuilles d’un vert profond : 2g dans 10cl d’eau à 65-70° ; 3 infusions. J’assiste impressionnée à l’échange entre Anne-Marie et Olivier qui, humant l’infusion perçoivent une odeur de marron chaud et de la châtaigne grillée au goût. J’aime les écouter comparer leurs sensations olfactives, j’en suis incapable et j’admire donc ce talent. Par contre, je reconnais dans la 3e infusion l’aspect grillé qui me fait penser à un Genmaïcha, pas mal, non... Nous découvrons ensuite un Tenko Kabusé (thé couvert quelques temps avant la récolte par une toile perforée empêchant le soleil direct ce qui permet aux feuilles de garder intacts tous leurs composants entre autres la chlorophylle si j’ai bien retenu ce que j’ai lu; on parle aussi de thé de pénombre.) Ici aussi : 2g dans 10cl d’eau à 60-65. Je crois percevoir des odeurs de prairie ou de gazon là où Anne-Marie et Olivier perçoivent un léger goût de fumet de poisson mais c’est toujours aussi intéressant pour moi de les écouter. On se rejoint par contre sur la texture du breuvage, plus dense que le Kukicha.
La 3e dégustation est double : 2 Sencha, un Kabusé et un Wazuka. Infusés en même temps, cela nous permet de les comparer, la couleur de l’infusion (le Kabusé plus vert, le Wazuka plus jaune, l’odeur (le foin pour Anne-Marie et moi, des notes marines pour Monsieur Thé) et le goût. Ici encore, les 2 "nez" ont perçu une attaque très foin, suivi très vite par des odeurs et une saveur de Mer du Nord, comme s’ils étaient sur l’estacade d’Ostende. Moi je sentais une odeur de… framboise (un de mes fruits préférés), ce qu’a confirmé Monsieur Thé, et là, je suis plutôt fière. Beaucoup d'autres échanges, riches, intenses, que je ne peux reproduire ici, ce que vous avez lu n'est qu'un petit aperçu, le reste est en moi, en nous. Voilà ce qui se passe le dimanche à l’Heure bleue. J’aime ces moments de découverte et de partage autour de cette boisson qui n’a pas fini de nous surprendre. Je vous encourage vraiment à venir vivre ces moments instructifs et conviviaux, peut-être se rencontrera-t-on un dimanche...
Désolée pour la mauvaise qualité de certaines photos...

De L'Heure bleue, l'instant créateur à l'Heure bleue, le temps du thé

J’en avais parlé déjà, aujourd’hui je passe à l’action, je commence la description de mes coups de cœur bruxellois dans le domaine du thé, que le Belge, traditionnel buveur de café (et de bière) commence à apprécier de plus en plus. Je vous invite donc à pénétrer à L’Heure bleue à la rencontre de Madame Bijou et de Monsieur Thé dont les parcours professionnels sont peu banals. Mais d’abord pourquoi "l’Heure bleue" ? L’heure bleue est ce moment de la journée où la luminosité commence à baisser, où on pénètre alors dans une atmosphère très particulière, on aperçoit des nuances de lumière bleue. C’est le moment préféré de Madame bijou, c’est alors qu’elle a des "flashes", une inspiration, que les choses se mettent en place dans sa tête et qu’elle peut commencer à créer.

Mais qui est exactement Madame Bijou? Voici son parcours : des études sérieuses qui ont fait de Muriel une "Consultante en management et logistique". Mais déjà derrière la raison pointait la passion : sa maman, passionnée par les brocantes, lui fait découvrir ce monde, l’adolescente qu’elle était est fascinée par les perles, les colliers qu’elle reconstitue, elle en crée même (déjà) et va les vendre au Marché aux puces tout en continuant ses sérieuses études. Son sérieux diplôme en main, elle décroche un travail qui l’est tout autant, il lui apporte reconnaissance sociale, situation financière plus que confortable, qualité de vie, bref une vie très conventionnelle. Elle tient 12 ans mais cette "qualité " de vie-là ne la satisfait pas, elle est faite pour créer. C’est Monsieur Thé qui la pousse à passer de la raison à la passion, sa passion. Et c’est ainsi qu’elle a quitté cette voie facile mais pas assez épanouissante et qu’elle est devenue Madame Bijou, je ne vous en dis pas plus, la photo parle d’elle-même.

A Monsieur Thé maintenant. Après des études de philosophie, Olivier décroche un poste d’assistant aux facultés universitaires de Namur mais pour lui aussi cette vie académique était trop "académique", une voie toute tracée, un statut social, une vie rangée mais finalement peu satisfaisante. Il quitte son poste à la fin de son contrat et devient Consultant en éthique médicale à l’Université catholique de Lille. Son travail lui prend +/- 2 jours par semaine. Mais comment est née sa passion pour le thé ? Il a fait un Master à Leeds, et c’est lors de son séjour là-bas qu’il a découvert "les petits thés mondains et les barquettes de biscuits anglais" (cette jolie formule est de lui) avec les étudiants du cru. C’était essentiellement du Witthard parfumé mais petit à petit il s’est mis aux thés nature. Il découvre aussi le fameux Five o clock, ce moment où tout s’arrête et pendant lequel tout Anglais digne de ce nom déguste sa tasse de thé (noir avec lait et/ou sucre), mais à côté de ce rituel sympathique il y a aussi une profonde philosophie : pour eux, ce break leur montre également que le monde peut tourner sans eux, qu’ils ne sont pas indispensables. Belle leçon de modestie, non ? Rentré au pays, il a suivi les cours du Palais des Thés à Paris et a rencontré Guillaume Leleu, le talentueux et créatif propriétaire des Thés "ThéOdor" (http://www.theodor.fr/). Voilà comment un philosophe est devenu Monsieur Thé.

Et, pour terminer cette première partie, voici les renseignements pratiques : Avenue des Arts, 12 – 1210 Bruxelles ; Tél. : 02 223 40 75. Ouvert du lundi au vendredi de 12 à 18 heures et le 1er dimanche du mois de 10 à 18 heures. Métro ligne 1 – Arts-Loi (2 minutes à pied) ou Ligne 2 – Madou (1 minute à pied).
Il ne vous reste plus qu’à aller découvrir cette boutique si singulière où vous serez accueilli par ce couple de passionnés dans une ambiance très "heure bleue".

samedi 5 juillet 2008

"Là où 2 ou 3 se réunissent en mon nom, je suis au milieu d'eux"...

Le monde du thé a ceci de particulier, que cette phrase "biblique" lui va très bien : "Là où 2 ou 3 d’entre vous se réunissent en mon nom, je suis au milieu d’eux"… Cet après-midi nous étions 3 et IL était au milieu de nous. Je ne vous ferai pas l’affront de préciser qui est IL, je suis certaine que vous avez déjà trouvé... si, par hsard, ce n'était pas le cas, ce qui suit vous le fera découvrir. Je connaissais déjà Fanou, l’heureuse propriétaire de la boutique Magie du Thé de Namur (j’en reparlerai plus tard), et j’ai pu mettre un visage sur Benoit alias Benead (Ma route du thé ), mon deuxième invité. Il était l’heure de goûter, nous avons donc commencé par un "apéritif"au thé (Pavillon sous la lune + jus d’oranges pressées). Vint ensuite sorbets et glace au Matcha et enfin poire au sirop de thé + glace au Pu Er, oui, oui, vous lisez bien. Tout en dégustant nous faisons plus ample connaissance, j’ai été impressionnée par les connaissances de ce très jeune passionné entre autres sur les Pu Er. Vous le voyez sur la photo, il parle de sa (notre) passion et, à voir Fanou, c'est tout sauf triste et ennuyeux! Ici, sorbets et glace au Matcha, mais prise dans le feu de la discussion, j'ai oublié d'immortaliser les poires au sirop et la glace au Pu Er, ce que je peux vous dire c'est que les assiettes se sont vidées très vite.
Après cela, direction le premier étage et mon salon bleu-thé. Nous avons tout naturellement opté pour un Pu Er cuit. Fanou est perplexe face à ces Pu Er : comment les reconnaître, qu’acheter ? Qui est assez connaisseur pour répondre à ces questions… Il est assez aisé de décrire les thés verts, Oolong, rouges, mais quid des thés noirs ? Voilà une piste à creuser, ni Benoit ni moi n'avons de réponse assez précise. Je leur montre alors un livre magnifique sur ces thés si particuliers acheté à Taipei: photos superbes mais texte en mandarin, ils ont regardé les images (qui font rêver) et nous avons échangé nos connaissances. Je parlerai plus tard du livre et des "roues" qui ont retenu notre attention mais j’ai besoin de Ling-Ling, ma traductrice préférée pour percer les mystères de ces thés compressés, du moins à partir des textes. Mais malheureusement le temps passe très (trop) vite, et après 4 infusions seulement nous devons nous séparer à regret en nous promettant de nous revoir. Après leur départ, j'ai continué les infusions - 9 au total - je pourrais encore pousser plus loin mais je vais suivre les conseils de Benoit, remplir la théière d'eau froide et laisser infuser le thé toute la nuit, je suis curieuse de goûter le résultat.
A propos: qui était au milieu de nous???