samedi 19 janvier 2013

Les jours défilent, le réseau se défile


Mercredi, 
un beau soleil illumine une neige tombée en abondance la veille et la nuit, 
10 cm exactement .Déjà que la neige, le verglas et les travaux dans une maison perturbent tout, mais si en plus le réseau se défile, cela fait beaucoup et le pire a été à venir, mais une chose à la fois…
Jour faste, je reçois ENFIN ma chère Fanou, nous devons préparer la conférence de dimanche, mais avant le (petit) effort, le réconfort, un Yamato Kabuse Sencha griffé ThéÔdor et pour arriver dans le salon bleu-thé, elle a dû enjamber les débris de moquette de l’escalier et l’hallucinante poussière du dessous, j’ai cru que dans les temps anciens (elle a 50 ans), on la fixait avec du sable très fin ! Moments de profonde réflexion bien sûr, nous ne faisons pas les choses à moitié…
Mais aussi franche rigolade, ce qui n’est pas difficile, il suffit qu’elle me raconte les exploits de ses Twins qui n’en ratent pas une pour mon plus grand bonheur, j'ai hâte de les revoir.
Jeudi sera un autre jour faste, le matin d’abord, même décor, 
même thé pour peaufiner le travail.
D’habitude, par ce temps je ne quitte pas la douce chaleur de la maison, mais il y a une exception notable… 
Tout est prêt pour nous accueillir, c’est bien cela nous sommes dans ce lieu d’excellence. Une grande absente cependant, Annik qui a glissé sur une plaque de verglas et a dû se faire opérer du col du fémur. Elle a eu un geste qui m’a bouleversée, elle a tenu à ce que nous allions chez Jing d’autant que c’est la dernière fois avant longtemps, dimanche elle s’envole pour 3 mois à Taiwan…
Premier thé, un Mi Xiang Oolong, "grade spécial".
A voir la taille des boules, on peut déjà imaginer la taille des feuilles.
Et dans l’attente, toujours les mêmes gestes lents et harmonieux de Jing.
La liqueur est pâle et le parfum de miel déjà très présent dans les feuilles sèches, se retrouve au goût. 
Cette concentration sur l’instant est belle, cela m’impressionne toujours autant.
Vincent, celui qui a aussi fait partie du voyage au Caire, le veinard, ne me contredira pas.
Les infusions se suivent, Jing répond à nos nombreuses questions avec toujours autant de sérénité contagieuse. Nous en sommes maintenant à la douzième infusion, les saveurs, toujours aussi subtiles, me font penser à un grand Alishan.
Les rires font aussi partie de ce cérémonial et reflètent cette atmosphère de vraie détente et de joie profonde que l’on retrouve à chaque fois…
Et elles n’ont pas encore tout donné !
La taille des feuilles est vraiment impressionnante.
Avant de passer à du très lourd, Jing nous montre cette beauté qui vient d’arriver, j’en tremble !
C’est certain, quand je retournerai à Taiwan, (si Lu Yu le veut en 2015 = message codé…), je ne choisirai pas, je prendrai les deux ! 
Et le très lourd, le Jin Jun Mei 
Le voilà. C’est un tout grand thé issu de théiers sauvages qui se développent sur les rochers de Wu Yi, entre 1500 et 1800 mètres d’altitude 
C’est le thé préféré d’Hu Jin Tao et si j’ai bien retenu le seul thé qu’il boit, ça, c’est pour l’anecdote.
En humant ces magnifiques feuilles, le cri du cœur de Vincent : "Il sent très fort le tabac de la Semois", ce que je confirme, dans ma folle jeunesse je me suis essayée à la pipe et c’est ce tabac au paquet écossais que j’utilisais… J’ai donc hâte de le découvrir, ce Beau Sourcil d’Or 
Tandis que Jing remplit les sets de dégustation, je me demande si je vais retrouver dans mon bol la saveur de ce fameux clan très aromatique. 
Une fois la liqueur transvasée, ce qui reste de parfum dans la tasse à sentir dégage effectivement des odeurs de tabac assez aromatiques effectivement, mais pas vraiment de clan comme dans ma mémoire. 
Vincent nous révèle qu’on vend plus de ce tabac qu’on n’en produit, tiens, tiens, cela me rappelle le Darjeeling qui subit la même escroquerie.
Les infusions continuent, les informations sur ce thé sublime aussi.
Il est cueilli uniquement par des jeunes filles 
 Jing  et Anne y perçoivent des saveurs de prune, et moi de … cacao. Les dernières infusions donnent maintenant des notes plus boisées, de santal pour Anne, de vétiver pour moi.
Et tandis que j’admire ces belles sont loin d’avoir tout donné même après 12 passages, Jing nous apprend qu’il ne faut pas moins de dix mille bourgeons pour manufacturer 500 g de thé, ce que explique son prix exorbitant. Mais que fait donc cette petite feuille verte perdue parmi les belles ? Elles sont maintenant chez moi, j’en parlerai plus tard. Le bonheur continue. 
Nous allons maintenant découvrir ce vieux Yunnan de 26 ans. C’est un Chen Nian Ji Ping Tian Hong, traduit littéralement : un Ancien qualité extrême Yunnan rouge, cela promet.
Rien que les feuilles sèches, constituées uniquement de bourgeons nous en donnent déjà une belle idée.
Je suis étonnée de la couleur de cette première infusion, très pâle pour un vieux thé.
Moments précieux, 
 intenses encore et toujours 
qui se passent
de commentaires.
Sauf pour présenter Vanella, qui est aussi en partance pour Taiwan, la veinarde. Et comme elle dit si bien, ceux qui y sont allés une fois n’ont qu’une hâte, y retourner, ce n’est pas comme le thé (= message codé…)!
Elles n’ont pas encore tout donné, elles feront bientôt des heureux… Je suis comme chaque fois sur un petit nuage, j’oublie de noter, je ne pense quasi plus à faire des photos, c’est dire !
Quant au thé suivant, un Pu Er, je n’en reviens pas encore… Dès l’ouverture du sachet, je suis transportée dans le grenier de ma si chère grand-mère. 
Il s’appelle Océan, Da Hai (traduction grande mer) C’est un vieux Pu Er de 1960, mais cela Jing nous y a habitués… Par contre, qu’il soit broyé c’est la première fois que je vois cela et ma première réflexion a été qu’il ressemble à ce qu’on trouve dans les petits sachets jaunes… J’ai gardé pour moi cette réflexion saugrenue ! Elle ne l’était pas parce qu’effectivement à l’époque, on voulait en faire du thé en … sachet, mais le projet n’a jamais abouti, les frais de manufacture et d’emballage étaient trop élevés. 
Ce qui est très surprenant par contre, c’est la couleur très "café serré" de l’infusion. 
 L’air dubitatif de Vanella traduit peut-être ce qu’elle pense mais non, ce n’est pas du café et surtout pas italien… = message à peine codé.
J’ai trouvé les premières infusions assez « lourdes ». 
J’ai par contre retrouvé les notes que j’aime dans la dernière.
Les feuilles infusées n’ont changé que de couleur. 
Merci ma chère Jing pour cette improbable découverte, j’ai encore appris ! 
Nous arrivons maintenant à l’apothéose, ce Ding Xing de … 1930. Je n’ai pas vu les feuilles sèches, Jing l’a ramené du Caire où il avait déjà infusé 48 fois! 
Que va-t-il encore nous offrir ? 
Une indicible douceur et des saveurs subtiles que j’ai du mal à identifier. 
Jolie et énigmatique mimique de Vanella… 
Concentration de Jing qui nous explique qu’il a un effet très bénéfique sur le corps.
Moi, ce n’est  pas uniquement sur le corps qu’il agit,
c’est sur l’ensemble de mon être et en le savourant, une seule phrase me vient, un très beau proverbe indien : "Faites du bien à votre corps pour que votre âme ait envie d’y rester".
Les heures passées ici
sont de vrais moments d’éternité.
Nous en sommes maintenant à la 60e infusion, ce sera la dernière, Jing va les infuser à nouveau samedi pour les amener à Annik, cela lui rappellera des souvenirs cairotes. Jing nous explique que ce lieu a été choisi parce que des endroits comme les pyramides  dégagent des énergies exceptionnelles.
Le prochain rassemblement se fera sans doute au Machu Picchu, cette "vieille montagne" en dégagera beaucoup certainement … Jing semble y être déjà !  
(Il est déjà temps de nous quitter je jette un dernier regard particulièrement ému sur cette exceptionnelle théothèque. Merci ma chère Jing pour cet après-midi hors du temps pendant laquelle nos 5 sens ont frémi une fois encore. Je te souhaite tout le bonheur du monde, ta rencontre a été un moment phare de 2012, je ne sors jamais d’ici sans cet état de bien-être que tu induis et pas seulement avec tes thés d’exception… Un merci ému également à toi Annik, grâce à ton beau geste généreux, nous avons vécu des moments forts que tu connais bien. Juste avant de partir, c’est incroyable Pierre t’a eue au téléphone, tu étais encore en sale d’op quand nous sommes partis à Louvain-la-Neuve.  Nous nous reverrons le 3 février. Non, non, je n’ai pas disjoncté, je n’ai pas changé de sujet, ce sont bien des croquettes pour chat… Par contre, dans le bol ce n’est ni de l’eau ni du lait 
Martagon est le seul chat qui ne boit que du thé ! Dernière petite remarque : j’aurais dû rédiger ce billet il y a 2 jours déjà mais vu la poussière, j’avais bien emmitouflé et entreposé en lieu sûr mon PC, quand j’ai voulu le reprendre, je n’avais plus de réseau, il a été restauré seulement hier soir. Si je n’avais pas vécu ces moments qui ont un effet quasi indicible sur moi, j’aurais "pété un câble", d’autant que je n’avais plus accès à mon salon bleu-thé, on a dû y entreposer des petits meubles. Je l’ai retrouvé seulement ce midi et pas pour très longtemps, dès lundi il sera à nouveau indisponible !  
J’ai donc pu infuser à nouveau ces feuilles au milieu desquelles trône une petite feuille différente. 
Mais d’abord un rinçage immédiat pour les réveiller, cela fait 2 jours qu’elles n’ont plus connu l’eau. 
Elles se prélassent maintenant au fond de leur baignoire, pas une ne danse. 
Quel nectar se cache-t-il sous ce champignon taïwanais ? 
La couleur de l’infusion est très pâle et de la tasse à sentir n’émerge quasi plus de parfum. La saveur est elle aussi très timide, je pense que je devrai infuser plus longtemps. 
Effectivement, la saveur, bien que très atténuée, est un peu plus présente. 
Ont-elles encore un peu à donner ces belles lascives ? 
Même infusion, couleur qui semble être différente. 
(Ce fut le dernier passage, elles ont tout donné… après 15 passages tout de même ! Je vais maintenant peaufiner la conférence de demain, au Musée de la Céramique d’Andenne où a eu lieu une magnifique exposition de chawan : http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2010/03/encore-des-moments-de-partage-tres.html . Elle m’avait à ce point séduite que j’y suis retournée : http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2010/03/musee-de-la-ceramique-dandenne-le.html . Je suis ravie d’y retourner et surtout de partager avec Fanou notre passion du thé et sa transmission, ce sera encore une très belle journée... 

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