vendredi 11 mars 2016

Cinq ans déjà...

Hier soir, en regardant le journal télévisé, j’ai été bouleversée par le témoignage poignant d’une vieille dame survivante de la catastrophe de Fukushima. Avec une impressionnante dignité, vivant dans un minuscule baraquement, elle racontait qu’elle avait perdu son mari et ses petits-enfants et espérant qu’ils la voient de là où ils sont, elle crochète à longueur de journée des fleurs de toutes les couleurs. Comme un peu de vie dans ce lieu si exigu. Aucune révolte, aucune colère, ce qui est déjà admirable, mais ce qui m’a le plus touchée, ce sont ses yeux éteints... Cinq ans aujourd’hui, combien de personnes comme elle, dont l’espace de vie est encore si réduit, et que dire de cette vie fracassée par la perte de sa famille, de ses repères, de sa joie de vivre. Alors aujourd’hui ma journée sera japonaise, c’est très peu de chose bien sûr mais ne pas oublier que la cupidité, l’appât du gain et l’absence totale de morale d’un tout petit nombre a provoqué tant de drames, la honte et le mépris sur eux, la compassion pour ces destins brisés. 
C’est à cela que je pensais en regardant ce ciel sans aucun nuage, et un soleil encore un peu pâlichon qui fait briller l’écorce des bouleaux. 
Avant de m’imprégner de cette musique zen aux sonorités  si particulières enregistrée en pleine nature, je lis la première partie du fascicule, plus technique, jusqu’ici ignorée.  Il décrit aussi la pensée de Yoshio Kurahashi  à propos de cet instrument qu’il maîtrise à la perfection, en lui donnant une âme. "Suizen Ichi Nyo : souffler et méditer sont un même geste", Et plus loin: "La musique du shakuhashi, parce qu’elle émane du bouddhisme zen, provoque une émotion plus profonde que toute autre".   Cela, je le comprends très bien tant elle me touche au plus profond et provoque en moi  une émotion proche de l’extase, je pourrais l’écouter en boucle pendant des heures.  "Cette émotion s’exprime par le mu, le néant spirituel de la pensée zen. Et c’est ce qui rend cette musique universelle". C’est vrai qu’en l’écoutant, j’ai l’impression (la certitude ?) d’être transportée dans un ailleurs de plénitude extrême. Mais ce qu’il en dit alors me laisse perplexe: "Yoshio Kurahashi respecte profondément la tradition et en même temps la rejette. Justifiant ce paradoxe par le mu, il considère que la meilleure façon de se comprendre entre êtres humains est justement de ne pas essayer de se comprendre car nous ne sommes pas semblables ou différents, nous sommes tout simplement, dans ce néant qui nous offre la paix intérieure". Il est temps d’écouter la musique 
tandis que je continue à vider mes boîtes avec ce Sencha Yakushima  la troisième et dernière achetée chez Lupicia un certain jour béni de septembre :
http://la-theiere-nomade.blogspot.be/2015/09/jamais-deux-sans-trois.html, ma chère Marie-Aline, c'est quand tu veux (et quand je peux) pour le renouvellement des stocks... . 
C’est le fond du fond du sachet toujours aussi odorant, ça sent vraiment le printemps. 
Quelle belle harmonie entre la musique et les feuilles, magnifique hommage à la nature. Je savoure ce nectar en espérant que là-bas, celle-ci a repris ses droits… Après la méditation, une petite balade dans le jardin 
où je dérange les hôtes du restaurant sauf cette petite mésange bleue téméraire. 
En dressant la table pour le dîner, le spectacle est dehors… Il est déchaîné, envie sans doute de perpétuer l’espèce ! J’ai des envies de jardiner mais à part désherber, il n’y a encore rien à faire et puis il ne fait pas très chaud, un petit vent piquant s’est levé, 
et le ciel, si bleu ce matin, s’est couvert de nuages. 
Retour dans mon salon bleu-thé, dans la tasse, un Genmaïcha griffé Azumaya, et ce livre de haïkus. J’aime la poésie mais j’ai du mal avec ces poèmes-ci malgré l’explication qui en est donnée en début du livre :
"Le haïku est par excellence l’expression littéraire du zen (transcription japonaise du sanscrit dhyana "contemplation"), cette expérience éminemment libératrice au cours de laquelle on s’aperçoit que fondamentalement, il n’y a rien, comme le disait le vieux maître zen chinois Feng kan (8ème siècle). Il ne reste plus alors qu’à lâcher philosophiquement prise et à s’accorder au cours des choses". 
Si le texte ne me parle pas vraiment, la calligraphie par contre m’attire et m’apaise. Là se trouve la poésie… Cette journée s'achève, pleine d'interrogations: quelles sont les conséquences psychologiques d'un tel drame? Et les enfants? Sont-ils atteints comme à Tchernobyl de séquelles gravissimes comme le cancer de la thyroïde? On n'en parle pas par ici. Et précisément dans ce pays, comme en France d'ailleurs, pourquoi ne tire-t-on pas les leçons de tels drames? Faut-il qu'une de nos centrales nous explose à la figure?

3 commentaires:

Cathy a dit…

Bonjour Francine

Merci pour ce très joli texte, très humain.....
Malheureusement aussi bien ici que làs bas on se demande si les politiciens pensent à leurs peuples :(
Bonne journée & bises
Cathy

Mab a dit…

Que répondre à ces interrogations de fond???...
Bonne journée d'azur!
Bizzzzz arc-en-ciel :-)

Francine a dit…

@ Cathy: concernant la Belgique, j'ai la réponse... A très vite chère Cathy

@ Mab: bien des choses chère Marie-Aline...

A vous deux: bonne soirée et à très vite j'espère, ici, à Anvers ou à Strasbourg! Bises théinées